par Jean Fabbri
Profondément modifiés dans leurs fonctions, et dans son mode d'élection et sa composition pour le conseil d'administration, les conseils centraux des universités ont tous (ou presque) été renouvelés dans les cinq derniers mois.Un regard sur l'ensemble des scrutins universitaires : LRU saison 2
Avec une forte participation électorale générale, nombre de présidents qui se représentaient sortent confortés avec des CA bien peu pluralistes. Les listes contestant la loi LRU et ses logiques marquent le pas ou sont en retrait sur 2008, malgré quelques notables succès. Le SNESUP est la seule organisation qui a présenté partout des candidats et qui compte le plus large réseau d'élus dans tous les conseils
L'examen attentif des premiers scrutins de ce type(1), après les exceptionnelles mobilisations du printemps 2009, montre un paysage beaucoup plus contrasté que ne laissaient entrevoir les AG et cortèges de ce fort moment revendicatif. Les enseignants- chercheurs seuls, ou mêlés à d'autres universitaires, ont depuis 2009 été consultés à plusieurs reprises, mais les taux de participation (28 % au CTPU en 2010, 50 % pour le CNU(2) en 2011) pèsent moins que les plus de 70 % (en moyenne) dans les élections « locales » récentes. Le caractère représentatif des votes fournit donc un état des lieux incontestable. Mettant de côté l'élection du président de l'université par le CA dans un cadre de très forte distorsion de sa composition du fait de la loi LRU, nous examinerons le nombre, la composition et les scores des listes construites autour d'une plateforme globale(3) pour l'établissement.
Les résultats des listes construites avec ou sans étiquettes syndicales en portant la critique radicale de la loi LRU et de ses déclinaisons statutaires et budgétaires sont, sauf exceptions (Le Mans, Poitiers, Toulouse, Reims, Grenoble, Montpellier 3, Paris 1, Paris 8 et Paris 10), stables ou en retrait sur 2008. Les villes où nos idées progressent recouvrent des structures contrastées : établissements intégrés aux opérations Idex (Toulouse) ou peu arrosés par les Labex.
Dans plusieurs universités, la dichotomie des résultats entre les collèges A et B du CA, qui existait en 2008 et avait conduit le SNESUP et ses alliés à détenir la moitié des sièges « enseignants-chercheurs et enseignants » du CA a cessé : ainsi à Dijon, Créteil, Orléans, Paris 6, Marseille (dans un contexte post-fusion), le nombre d'élus syndicaux régresse brutalement (effet de la prime majoritaire). Comme il y a 4 ans, mais dans une moindre mesure, les syndiqués SNESUP ne se retrouvent malheureusement pas tous sur les mêmes listes. Paris 4, Paris 13, Angers, Rouen, La Réunion, d'autres, témoignent des difficultés à faire vivre, discuter et adopter des positions communes et fortes au sein des sections syndicales. Les périmètres des listes de rassemblement auxquelles participent (le plus souvent en étant à l'initiative) les militants de notre syndicat, sont là aussi très variés. D'un arc syndical très large (Poitiers), à des oppositions où le SGEN (Rennes 2), l'UNSA (Paris 11, Orléans) jouent contre les candidats SNESUP, les configurations sont des plus
variées et tendent à obscurcir les enjeux en les déconnectant des analyses sur les dimensions nationales des difficultés de l'enseignement supérieur et de la recherche. Le SNESUP est la seule organisation syndicale à afficher sa présence dans tous les scrutins et à obtenir presque partout au moins un élu.
Les conseils centraux où sont représentés toutes les catégories de personnels et les étudiants font apparaître d'autres lignes de clivages. Les combinaisons d'alliances syndicales chez les BIATSS sont très variées. La présence FSU (SNASUB et UNATOS) dans
ces scrutins est assez faible. Si l'UNEF est, comme le SNESUP, présente partout, ses résultats sont très inégaux, largement devancés par ceux des listes corpo. Cet aspect contribue parfois à l'inversion des majorités relatives obtenues par des listes des deux collèges enseignants (Paris 11). Comme nous l'avions souligné dès le projet projet de loi en 2007, l'obligation de représenter chacun des secteurs de formation pour les listes au CA, conduit à accorder un rôle d'arbitre a priori aux corporations médicales et juridiques. Les difficultés pour composer les listes syndicales en particulier dans le collège des professeurs d'université, là où existe un secteur santé, ont été considérables (Paris 12, Tours, Nantes, Dijon...) et cette surreprésentation des milieux de la santé conduit à une augmentation du nombre de présidents PU-PH passés de 7 à 21 à la tête des universités en 4 ans, ce qui se retrouve au plus haut
niveau : L. Collet, de la CPU à la direction du cabinet de la ministre par exemple. Il ne sert à rien de travestir la réalité du moment même si nous travaillons pour la modifier en profondeur. Un certain nombre d'universitaires pris dans une cascade de bouleversements qui affectent, et pour l'essentiel dégradent, la recherche, les contenus pédagogiques et les structures même de l'enseignement supérieur, se sont réfugiés dans une forme d'attentisme
en confortant le plus souvent les présidents qui se représentaient. Faire revivre la collégialité démocratique et insuffler un profond renouveau n'attend pas !
(1) La première vague de ces scrutins dans le cadre de la loi LRU s'est tenue entre décembre 2007 et juin 2008.
(2) Au CNU les listes « non syndicales » sont données à 40 % par le ministère dans un décompte savamment biaisé, une étude plus fine et moins à charge, les crédite de 35 % soit légèrement plus que les listes SNESUP et d'union syndicale incluant le SNESUP.
(3) Le plus souvent pour les trois conseils ou au moins deux d'entre eux CA et CEVU.
Un regard sur l'ensemble des scrutins universitaires : LRU saison 2
Publié le : 17/06/2012