Tribune de J Fabbri sur le rapport Aghion

Publié le : 04/02/2010

bonjour,

 

il me semble important de construire une critique cohérente du rapport  Aghion diffusé le 26 janvier.On peut mettre en perspective ce texte et  les nouvelles nominations au Comité de suivi de la loi LRU où quelques  universitaires de droite (JM Schaenker, déjà bénéficiaire d'une tribune
régulière dans la presse économique, rejoignent là ceux du pseudo  "institut Montaigne" laboratoire d'"idées" patronal....

Le document remis à la ministre et signé par P. Aghion, un  universitaire qui ne travaille pas en France, est de fait une production  de bonne qualité pour un travail de compilation et d'application de  modèles macroéconomiques vraisemblablement confié à un groupe  d'étudiants américains. Sur 50 pages et beaucoup de schéma, nombre  d'entre eux restent dans leur langue d'origine.

La part de réflexion politique est très mince. Le document ne discute  pas une seule fois la logique de service public et d'aménagement des  territoires (nationaux ou plus vastes), il présuppose une mobilité  absolue des "bons étudiants". La vision américaine très normative de P.  Aghion s'impose dans toutes les pages, mêmes celles consacrées à  quelques universités européennes, voire au seul cas français abordé  "l'Ecole d'Economie de Toulouse", qui justement n'est pas une  université. Les liens entre les contenus enseignés, l'adossement à la  recherche et les "besoins" de l'économie réelle ou plus généralement de  la société -y compris dans les dimensions non professionnelles- sont  ignorés. Le point de vue adopté est celui de dirigeants de grands  groupes (banques, industrie ou fonds d'investissements) dans leur  capacité de peser sur les choix stratégiques des établissements, à peser  en tant que décideurs ultimes -y compris sur les choix scientifiques et  -liés- les enseignants-chercheurs à distinguer. [les turpitudes autour  de la "pandémie" grippale et des groupes pharmaceutiques éclairent cette  dimension].

Les acteurs de l'enseignement supérieur et de la recherche en France  comme à l'étranger, leurs instances collectives de prospectives et/ou  leurs expériences et propositions sont délibérément exclus de toute  mention dans ce rapport.
Les vives contestations en France et ailleurs en Europe des stratégies  telles la loi LRU en France, n'apparaissent pas explicitement. Pourtant  P. Aghion est obligé de reconnaître la part incontournable dans le monde  universitaire de la collégialité. Ce terme, mentionné à plusieurs  reprises, est uniquement mentionné pour les choix non stratégiques et de  régulation sociale... on est très loin des exigences universitaires  réelles. La question de l'égalité des chances et de la sélection n'est pas discutée.

Un rapport non pluraliste au seul service de la promotion de son auteur  et de la ministre commanditaire! Quelle honte.

Jean Fabbri

 

Ps : le rapport Aghion est ici