Publié le : 28/01/2010


Nous et le Rapport Aghion

Le document remis à la ministre et signé par P. Aghion, un universitaire qui ne travaille pas en France, est de fait une production de bonne qualité pour un travail de compilation et d'application de modèles macroéconomiques vraisemblablement confié à un groupe d'étudiants américains. Sur 50 pages et beaucoup de schéma, nombre d'entre eux restent dans leur langue d'origine.

La part de réflexion politique est très mince. Le document ne discute pas une seule fois la logique de service public et d'aménagement des territoires (nationaux ou plus vastes), il présuppose une mobilité absolue des "bons étudiants". La vision américaine très normative de P. Aghion s'impose dans toutes les pages, mêmes celles consacrées à quelques universités européennes, voire au seul cas français abordé "l'Ecole d'Economie de Toulouse", qui justement n'est pas une université. Les liens entre les contenus enseignés, l'adossement à la recherche et les "besoins" de l'économie réelle ou plus généralement de la société -y compris dans les dimensions non professionnelles- sont ignorés. Le point de vue adopté est celui de dirigeants de grands groupes (banques, industrie ou fonds d'investissements) dans leur capacité de peser sur les choix stratégiques des établissements, à peser en tant que décideurs ultimes -y compris sur les choix scientifiques et -liés- les enseignants-chercheurs à distinguer. [les turpitudes autour de la "pandémie" grippale et des groupes pharmaceutiques éclairent cette dimension].

Les acteurs de l'enseignement supérieur et de la recherche en France comme à l'étranger, leurs instances collectives de prospectives et/ou leurs expériences et propositions sont délibérément exclus de toute mention dans ce rapport.
Les vives contestations en France et ailleurs en Europe des stratégies telles la loi LRU en France, n'apparaissent pas explicitement. Pourtant P. Aghion est obligé de reconnaître la part incontournable dans le monde universitaire de la collégialité. Ce terme, mentionné à plusieurs reprises, est uniquement mentionné pour les choix non stratégiques et de régulation sociale... on est très loin des exigences universitaires réelles. La question de l'égalité des chances et de la sélection n'est pas discutée.

Un rapport non pluraliste au seul service de la promotion de son auteur et de la ministre commanditaire! Quelle honte.

 

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