Promouvoir l'égalité professionnelle dans les universités : le rôle des missions égalité Femmes-Hommes

Publié le : 19/02/2013


Promouvoir l’égalité professionnelle
dans les universités : le rôle des missions
égalité Femmes-Hommes

par Laurence Marsalle, MCF Mathématiques, Chargée
de mission pour l’égalité Femmes-Hommes, université Lille 1

 Afin d’objectiver le discours sur les inégalités liées au sexe et combattre les prénotions,
la tâche prioritaire est de disposer de données sexuées.

Les premières missions égalité Femmes/
Hommes (F/H) sont apparues dans les
années 2000, suite à une volonté politique du
Fonds Social Européen d’avancer sur la question
de l’égalité des sexes. Plus récemment, la
charte votée par la CPU en 2009 a entraîné une
nouvelle vague de créations de missions égalité
F/H dans les universités. À ce jour, on en
compte environ 40, dans les 83 universités
françaises. Ces missions et leurs moyens (financiers
et humains) sont très variables. Cela va de
l’université Paris Diderot-Paris 7, qui a un service
dédié au sujet (Pôle égalité Femmes-
Hommes), à des universités où cette mission
est associée à d’autres (égalité des chances,
handicap), ce qui peut conduire au délaissement
de l’une d’entre elles. Cette diversité
peut s’expliquer par les conditions de création
de la mission : est-elle le fruit d’une réelle
volonté politique d’une équipe de direction,
d’une volonté d’affichage, ou bien d’une
bataille entre un individu sensibilisé à la question
de l’égalité professionnelle et une équipe
de direction au mieux indifférente ? Tout cela
a un impact certain sur chaque mission. 

Une tâche prioritaire :
produire des données sexuées 

En quoi consiste les tâches de ces missions ?
D’après mon expérience, l’un des premiers
objectifs en matière d’égalité professionnelle
est d’assurer la production régulière et suivie
de données sexuées. Je dirais même que
toutes les données devraient l’être. Car dès que
l’on se pose des questions un peu fines sur ce
sujet (et c’est un sujet qui doit être abordé avec
finesse), on a besoin de chiffres pour comprendre
les causes des inégalités. Par exemple,
en tant qu’élue au CEVU, j’ai participé à la promotion
locale des maîtres de conférences
(MCF) à la hors classe(1). Régulièrement, on
avait le sentiment que les femmes réussissaient
mieux. Les chiffres dont je dispose
indiquent en effet un meilleur taux de réussite
chez les femmes que chez les hommes. L’explication
souvent avancée est que les femmes
attendraient d’avoir un très bon dossier pour
être candidate. Si cette explication est juste, on
devrait alors mener une campagne d’information
pour aller contre cette autocensure.
Mais pour la valider, il faut disposer, sur une
dizaine d’années, des nombres sexués de MCF promouvables ayant été candidates et
ayant été promus. Pas si simple... 
Un autre exemple, d’actualité, a trait à la
volonté de l’État de rendre plus paritaires des
instances telles que les conseils d’administration
(CA) ou les comités de sélection (CS). Certaines
mesures volontaristes ont vu le jour
(loi n° 2012-347, article 55 sur les CS, qui
demande une proportion minimale de 40 % de
chacun des deux sexes) ou verront peut-être
le jour (listes alternées pour le CA(2)). Ici, on se
heurte souvent à l’argument selon lequel les
femmes, parfois peu nombreuses dans leur
établissement ou leur section CNU, vont être
surchargées de travail. Certes. Mais, là encore,
regardons les chiffres : à Lille 1, en 2009, la
proportion de femmes parmi les enseignants
et enseignants-chercheurs était de 28 % ; mais
34 % touchaient une prime pour responsabilité
pédagogique. Cette surcharge de travail là
ne semble pas poser problème, peut-être
parce qu’elle est apparue « naturellement » !
Ainsi, les chiffres permettent d’objectiver le
discours sur les inégalités liées au sexe, de sortir
du ressenti de chacun et parfois de propos
dignes du café du commerce. Au-delà, ils permettent une analyse statistique et sociologique
qui renforcent cette indispensable objectivation
et également sans doute de constater
que les inégalités professionnelles rencontrées
au sein des universités ne sont qu’une
déclinaison des inégalités liées au sexe qui traversent
la société dans son ensemble. La diminution
de la proportion de femmes lorsque
l’on passe des MCF aux PR dans toutes les sections
CNU (cf. graphique), n’est que la version
universitaire du fameux « plafond de verre »,
expression signifiant que les femmes accèdent
plus rarement que les hommes au plus haut
niveau de leur profession. Une piste d’action
pour y remédier parmi d’autres : sensibiliser
tous nos étudiant-e-s, lors de leur parcours
universitaire, à la question des rapports
sociaux de sexe...  
(1) À Lille 1, les CEVU et CS restreints, réunis, établissent
une liste de promus qui est ensuite examinée
par le CA restreint. 
(2) Voir page 32 de l’avant-projet de la loi
sur l’ESR (version du 15 janvier) : www.snesup.fr/
Presse-et-documentation?aid=6550&ptid=
5&cid=2030