Congrès du SNES-FSU - Intervention de Hervé Christofol

Publié le : 29/03/2018

Congrès du SNES-FSU

Intervention de Hervé Christofol

Secrétaire général du SNESUP-FSU

 

Bonjour à toutes et à tous.

Merci pour cette invitation et pour cet accueil.

Le gouvernement montre peu à peu son visage répressif après l’intervention violente des forces de l’ordre à l’université de Bordeaux début mars, la ministre a dissout les conseils de l’université Toulouse-II Jean-Jaurès en lutte. Après la journée d’action du 22 mars 2018 qui a vu de nombreux collègues et des étudiants se mobiliser aux côtés des fonctionnaires et des cheminots pour des revalorisations salariales et contre la loi ORE qui généralise la sélection à l’entrée à l’université, nous avons eu à déplorer une nouvelle escalade de la violence avec l’attaque de nervis fascistes à Montpellier qui ont blessé plusieurs étudiants qui occupaient un amphithéâtre de la faculté de droit. Je tiens à transmettre tous nos voeux de bon rétablissement aux victimes et à exiger que les coupables et leurs complices soient traduits devant la justice administrative et pénale.

Pour poursuivre la démocratisation de l’accès à l’enseignement supérieur, les enjeux des luttes contre les attaques du service public de l’enseignement supérieur sont considérables.

Ces attaques sont majeures, continues et systémiques.

Ces attaques sont majeures car :

  • elles s’attaquent à l’égalité de traitement sur l’ensemble du territoire en organisant via l’autonomie la concurrence entre établissements, mais également entre UFR, laboratoires et collègues ;
  • en ne dotant que quelques établissements par appels à projets dans une véritable stratégie de l’Iceberg, elles visent via la rhétorique de l’excellence à ne financer et rendre visibles à l’internationale qu’une petite dizaine d’établissements et à laisser sans le sou les 9/10es d’entre eux ;
  • en limitant l’accès à l’université avec la sélection, elles relèguent les lycéens qui réussissent le moins, ceux qui ont été orientés précocement dans une filière de bac non conforme à leur ambition, ou les moins confiants en leurs capacités, vers des études courtes voire les conduisent à abandonner tout projet d’études supérieures. Car il s’agit bel et bien de sélection, les algorithmes locaux imposeront de classer tous les candidats dans toutes les formations. Les lettre de motivation, CV et fiches Avenir ne seront pour la plupart lus par personne faute de temps et de moyens.

Rappelons que ce projet conservateur était déjà celui du ministre Alain Peyrefitte en 1968 puis d’Alain Devaquet en 1986 pour contrôler les flux, et qu’il a fallu l’insurrection et les mobilisations que l’on sait pour imposer un investissement massif dans l’ESR et l’abandon de la sélection. Notre société n’a pas eu à le regretter.

Ces attaques sont continues :

  • le gouvernement Chirac-Fillon puis Goulard crée l’ANR et l’AERES en 2006 ;
  • le gouvernement Sarkozy-Pécresse, en août 2007 avec la LRU, confie la gestion de la masse salariale et met en place dès 2009 le financement extrabudgétaire qui va se substituer aux fonds récurrents ;
  • le gouvernement Hollande-Fioraso confirme cette orientation avec la loi de 2013 et impose la logique de regroupement et de financements compétitifs ;
  • le gouvernement Macron-Vidal s’emploie à imposer la sélection, l’austérité et développe les inégalités ;
  • l’augmentation des frais d’inscription sera la prochaine étape de ce gouvernement ou du suivant, si nous ne parvenons pas à imposer une autre orientation politique.

Ces attaques sont systémiques :

  • l’accès sélectif à l’université a pour objectif de contenir les flux et forcer l’orientation de ceux qui réussissent le moins, c’est-à-dire les lycéens issus des classes populaires ;
  • la réforme du bac et du lycée, sous prétexte d’économies, individualise les parcours, crée des diplômes maison et une orientation précoce qui reproduit les inégalités sociales face au capital culturel ;
  • la réforme de la licence individualise, elle aussi, les parcours, casse les collectifs d’apprentissage et relègue ceux qui n’ont pas les attendus dans des parcours spécifiques ;
  • ces réformes dénigrent nos statuts et développent les recrutements contractuels (35 % dans l’ESR) ;
  • la reconnaissance de l’investissement pédagogique pourrait éteindre le statut de MCF ;
  • la énième réforme de la formation des enseignants pourrait encore détériorer une situation qui n’est pourtant pas aujourd’hui ce que nous voudrions qu’elle soit.

Le SNESUP-FSU rappelle qu’aux côtés du SNES et de la FSU, il défend une formation des enseignants de haut niveau reposant sur :

  • un recrutement par concours national pour tous les enseignants comme voie d’accès à la fonction publique ;
  • pas de décrochage entre premier et second degré : les enseignants du premier et du second degré doivent être recrutés au même niveau de diplôme, suivre une formation de même durée et de même qualité, sanctionnée par les mêmes diplômes ;
  • une entrée progressive dans le métier, c’est-à-dire pas de responsabilité immédiate, pas d’intégration des supports de stages dans les plafonds d’emploi ;
  • un continuum de formation de la licence aux premières années d’exercice ;
  • une formation universitaire et professionnelle dans le cadre d’un master : le niveau de qualification des enseignants doit rester à bac+5 ;
  • un adossement aux domaines de recherche pertinents pour la construction de la professionnalité ;
  • des prérecrutements dès la licence.

Aux côtés du SNES et de la FSU, le SNESUP-FSU s’opposera à toute entreprise d’affaiblissement ou de dénaturation de la formation des enseignants et à la précarité institutionnalisée pour tous ! Il continuera à demander une réforme pour une véritable formation universitaire et professionnelle, associant tous les acteurs et bénéficiant des moyens à la hauteur des ambitions.

Nous avons alerté, informé, mobilisé les syndiqués et les collègues de l’ESR, la mobilisation prend du temps mais elle progresse. Nationalement, nous avons appelé le 1er, le 6, le 15 février, le 22 mars, et localement à Paris-I et Toulouse d’abord, puis à Bordeaux, Montpellier et maintenant à Lille et Nanterre, ce sont dix universités qui sont régulièrement mobilisées et parfois bloquées.

Nous n’y parviendrons pas seuls, nous devons agir collectivement, fédéralement, et avec les autres syndicats de transformation sociale, avec les étudiants, les lycéens et les parents d’élèves.

Il s’agit bien entendu de revendications corporatistes pour défendre nos conditions de travail mais pas seulement, c’est surtout et avant tout un projet de société pour l’avenir de la jeunesse et du service public.

Nous pouvons gagner ce combat !

Bonnes mobilisations et bon congrès !

 

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