Lettre SNESUP-SNEP à V. Pecresse, L. Chatel concernant la certification CLES2 et C2i2E

Publié le : 15/06/2011

Madame la Ministre,


Quel que soit leur projet, il est souhaitable que les étudiants aient un niveau correct de pratique de langue étrangère à l'issue d'un master. Ce niveau peut être le niveau B2, qui correspond au CLES 2.


Pour atteindre cet objectif, l’enseignement relatif à la pratique d’une langue étrangère doit être intégré aux cursus de licence et/ou master et évalué dans ce cadre, sans pour autant qu’il ait besoin d’une certification extérieure complémentaire.


Actuellement, l’obligation pour tout futur enseignant d’avoir obtenu une certification de niveau CLES 2 et le C2i2e pour avoir accès au statut de fonctionnaire stagiaire après sa réussite au concours  rencontre de nombreux obstacles insurmontables pour les étudiants.


Atteindre le niveau CLES 2 dans la pratique d’une langue étrangère nécessite  un travail continu dans la durée, qui ne peut se faire que durant plusieurs années d’études. Il faudrait donc installer cette formation dès les premières années de licence, formation exclue jusque là du pseudo plan licence. Cette formation représente  un coût important en moyens (humains, matériels et financiers) à la charge des universités. Cette charge imprévue creuse des inégalités déjà importantes suivant les établissements.


Les étudiants qui entrent actuellement en master pour être enseignants n’ont pu bénéficier d’un tel enseignement et ne peuvent donc acquérir en un an les aptitudes correspondant à ce niveau. Des étudiants pourront donc être lauréats du master et admis au concours, mais risquent de perdre le bénéfice du concours s’ils n’ont pas le CLES 2. Cette certification exerce un barrage supplémentaire pour lequel ils ne sont pas préparés. Ce sont ainsi tous les efforts considérables des étudiants menés sur deux ou trois ans et leur réussite à des concours difficiles qui se trouveraient anéantis par la seule absence d’un certificat que les cursus universitaires normaux ne pouvaient les préparer à obtenir. Cette certification peut bloquer l’accès légitime de cohortes importantes d’étudiants au débouché naturel de leur formation : la carrière d’enseignant titulaire de la fonction publique. Est-ce le but recherché ?


Cette sélection aura donc des conséquences très dommageables, en pénalisant notamment les disciplines, où les effectifs de candidats sont faibles par rapport aux besoins (en sciences en particulier). En empêchant des lauréats des concours et détenteurs de masters d’être affectés en poste, elle mettra en péril la continuité du service public. Des étudiants de Licence et de Master renoncent actuellement à leur projet professionnel d'enseignant pour cette raison. Le ministère souhaite-t-il après avoir formé et recruté des étudiants les recruter comme contractuels?


Cette mesure constitue également un obstacle pour les concours internes. Elle  pénalise aussi fortement les candidats qui ont fini leurs études, par exemple en reconversion professionnelle, en reprise d’études ou en Validation d’acquis de  l’expérience, et les dissuade de devenir enseignants.


Des problèmes analogues se posent pour le C2i2e.


Alors que de graves problèmes sont à résoudre concernant la formation des enseignants et leur accès au métier, nous demandons un moratoire de 5 ans sur l’obtention du CLES 2 et du C2i2e pour que les universités aient le temps de réfléchir aux meilleurs moyens d’assurer ces formations et de construire des parcours intégrés dès la licence. Il faut aussi du temps pour que le ministère, s'il souhaite le développement d'un tel dispositif, dégage des moyens pérennes spécifiques pour les établissements.


Au moment où certains étudiants seraient tentés de se détourner de leur cursus et où de nombreux autres sont soucieux de gérer au mieux leurs études- notamment en M2-, le moratoire doit être annoncé immédiatement.


Nous vous prions d’agréer, Madame la Ministre, l’expression de notre haute considération.


    Stéphane TASSEL    Serge CHABROL