Lettre ouverte des syndicats de la FSU de la Région Alsace : Pressions et confusion pour un PRES et une fusion
Les deux universités alsaciennes ont inscrit l'objectif de constitution d'un PRES dans leur contrat quadriennal. Des discussions en cours, que ce soit au CESA, entre les politiques locaux ou les directions des établissements, se donnent pour objet d'évaluer les conditions d'une fusion rapide entre l'Université de Strasbourg et l'Université de Haute Alsace.
C'est dans ce contexte que pourrait être organisée l'absorption de l'UHA par l'UdS.
Le modèle qui est en train de s'imposer serait davantage un PRES de (ou avec) fusion qu'un PRES de réseau et de coordination qui a la préférence de la FSU ainsi que de nombreux personnels et universitaires directement concernés à Strasbourg comme à Mulhouse .
Au Cesagora du 17 novembre 2009, le président de l'UdS s'est engagé à consulter tous les personnels. Une consultation est programmée à l'UHA. Mais quelle sera la position des organismes de recherche ? Et pourquoi cette fusion est-elle voulue par les politiques régionaux et les directions de deux universités, et sans doute avec l'appui du Ministère?
La motivation principale affichée est d'améliorer l'offre de formation et la compétitivité internationale des laboratoires de recherche alsaciens. Ne s'agit-il pas bien plutôt d'« optimiser les coûts » en « mutualisant les moyens et en faisant des économies d'échelle » administratives ? La région Alsace espérerait ainsi réduire ses dépenses pour le Supérieur en créant une université alsacienne unique.
Une fusion à partir de telles considérations comporterait de nombreux dangers :
- L'Université de Strasbourg n'est certainement pas aujourd'hui en état de supporter à court ou moyen terme une nouvelle fusion. Elle vient à peine d'avaler trois universités aux modes de fonctionnement hétérogènes, elle n'en a même pas commencé la digestion et on voudrait déjà lui en faire avaler une autre.
- Les gains espérés par la fusion des administrations ne se produiraient qu'à la condition que des échelles pertinentes soient respectées selon les tâches à effectuer et les missions à assumer. Cela suppose une réflexion approfondie et très en amont sur la restructuration des services qui doit avoir des objectifs non pas financiers, mais d'abord fonctionnels. Cette réflexion doit être menée, non par les seules équipes présidentielles et administratives, mais par les deux communautés universitaires elles- mêmes. Et on sait le temps qu'il a fallu y consacrer, même comprimé par les échéances des contrats quadriennaux, pour arriver à l'UdS.
- La distance géographique importante entre les deux universités (110 km) générerait en cas de fusion des problèmes logistiques et administratifs non négligeables. Ce principe de réalité plaide pour une logique de rapprochement souple, fonctionnel, certainement mieux adaptée qu'une logique de fusion qui conduirait à la disparition de l'équipe de gouvernance de l'UHA, alors que celle-ci demeurera indispensable à la réactivité que requiert l'administration de milliers d'étudiants et de nombreuses composantes.
Le Sud Alsace possède des particularités en formation et en recherche qui lui sont propres : qui pourrait penser être efficace en organisant le pilotage depuis Strasbourg des formations professionnalisantes pointues et des laboratoires de chimie, de physique ou encore de l'ingénierie textile qui font la renommée de la recherche mulhousienne ?
- L'UHA ne représente certes que 7500 étudiants, mais cette « faiblesse » est l'un de ses atouts car, au plus près des demandes de formation et des besoins en recherche-développement, elle a su inventer ses identités remarquables. Une fusion négociée à la va-vite ou imposée à la hussarde lui ferait perdre sa réactivité et son intégrité.
- L'UHA est une université polyvalente où les deux facultés des Lettres, Langues et Sciences Humaines et des Sciences Economiques, Sociales et Juridiques forment des cadres pour les entreprises et les administrations. Le territoire de recrutement de l'UHA a besoin de ces jeunes cadres et une fusion ferait courir le risque de la disparition de ces formations à Mulhouse et, à terme, de la perte de compétitivité de ce territoire.
- Enfin, si dans les masters professionnels en particulier, beaucoup d'étudiants sont attirés de toute la France, les licences et la préparation des concours de la fonction publique permettent aux jeunes du Haut-Rhin souvent de milieu modeste d'accéder à l'enseignement supérieur. La non prise en compte par les hommes politiques de la Région de cette mission du service public de l'enseignement supérieur serait particulièrement inquiétante.
Ne pas vouloir la fusion des deux universités alsaciennes dans un avenir immédiat ne résulte en aucune manière d'un réflexe conservateur ou d'un localisme frileux. Faire travailler ensemble les universitaires des deux pôles régionaux, favoriser les collaborations et les mises en commun pertinentes des moyens, organiser et coordonner la carte régionale des formations et des laboratoires de recherche : les personnels universitaires haut-rhinois et bas-rhinois, non seulement y sont prêts, mais le souhaitent.
Une fusion, qui plus est précipitée et imposée d'en haut par les hommes politiques régionaux ou nationaux ou par les équipes dirigeantes strasbourgeoises et mulhousiennes, aboutirait à casser des dynamiques et des acquis dans le sud de la région et ne serait en rien profitable ni à l'Université de Haute Alsace, ni à l'Université de Strasbourg, ni à notre région.
Les syndicats de la FSU de la Région Alsace