Depuis le 22 octobre, les occupations d'universités se multiplient en Autriche. Des dizaines de milliers d'étudiants, d'enseignants et de personnels administratifs et techniques ont manifesté à la fois contre la réforme LMD mise en œuvre sans débat démocratique, et contre le manque de financement public qui entraîne l'augmentation des droits de scolarité et introduit donc une inégalité d'accès aux différentes filières de l'enseignement supérieur. Au-delà des revendications immédiates, des groupes de travail thématiques ont partout été créés pour discuter des politiques éducatives et scientifiques, de la culture générale et des finances de l'Université. Ils ont inscrit leur réflexion dans le cadre européen et ont lancé des appels pour que cette vague protestataire déferle sur le continent.
Ce sont d'abord leurs voisins qui ont répondu à cet appel. D'une part, en Allemagne les étudiants occupent des bâtiments universitaires à Darmstadt, Heidelberg, Münster, Munich, Potsdam. Une telle mobilisation spontanée et coordonnée, jusqu'alors inconcevable dans cet État fédéral où les politiques éducatives sont du ressort des Länder, a été rendue possible par la semaine de grève nationale de juin dernier, qui a assuré un premier travail d'information sur les enjeux européens. D'autre part, en Hongrie, c'est l'ensemble du secteur de l'Éducation qui a manifesté le 7 novembre à Budapest contre les réductions budgétaires et la précarité des personnels.
L'Italie, qui a connu durant l'automne 2008 une forte mobilisation contre les réformes de l'Université, juste avant le mouvement français, puis le 18 mars 2009 une journée de grève et de manifestation des travailleurs de la connaissance, massivement suivie, voit renaître l'Onda. Face à la réactivation de la réforme berlusconienne qui met en péril l'Université publique, des étudiants et des personnels précaires mènent depuis le 3 novembre des actions de protestation à Rome, Venise, Padoue, Palerme... Une manifestation nationale est prévue à Rome. Ils luttent contre des mesures analogues, mais souvent en pire, à celles prises ces dernières années par le gouvernement français : restructuration de la « gouvernance » universitaire sur le modèle de l'entreprise concurrentielle ; participation de représentants plus nombreux du secteur privé à la gestion des universités publiques ; mise en compétition des facultés et des laboratoires à travers l'établissement de classements par une agence nationale d'évaluation et indexation des financements aux performances ; généralisation des recrutements des chercheurs sur contrats temporaires. Ainsi que contre l'augmentation des droits d'inscription accompagnée d'un dispositif de prêts aggravant la précarité des étudiants par leur endettement
Ces analogies ne lient pas seulement la France à sa voisine transalpine, mais à l'ensemble des pays européens participant au processus de Bologne et à la stratégie de Lisbonne. C'est dans le cadre de cette stratégie et sous l'influence des lobbies des grandes entreprises que les États membres de l'Union européenne coordonnent leurs politiques d'éducation et de recherche dans un souci de compétitivité économique qui va à l'encontre des valeurs du service public. C'est pour réaffirmer ces valeurs démocratiques et émancipatrices que le Snesup, dans le cadre du collectif Printemps 2010, a lancé dès janvier 2009 un appel à mobilisations européennes (voir ci-dessous). Avec les autres organisations membres de ce collectif, le Snesup s'efforce de tisser un réseau européen avec les signataires de cet appel en vue d'organiser un contre-sommet en mars 2010, au moment où les chefs d'État et de gouvernement se réuniront pour célébrer les dix ans de la stratégie de Lisbonne et relancer ce processus en projetant l'« horizon 2020 ».
Dans la continuité du mouvement du premier semestre 2009, il nous faut saisir cette occasion pour faire entendre notre voix, celle de la communauté universitaire, et ouvrir le débat sur le service public d'enseignement supérieur et de recherche que nous voulons en Europe. D'ici là, c'est par la démultiplication des mobilisations locales que nous gagnerons une audience européenne.
Dans chaque université et dans chaque laboratoire, entrons en résistance européenne !
Entrons en résistance européenne !
Entrons en résistance européenne
Publié le : 09/11/2009