Budget 2015 pour l'enseignement supérieur et la recherche :
jeu des 1000 emplois, faites vos gels, rien ne va plus !
Avec la parution ce 1er octobre du projet de loi de finances 2015, et malgré des informations encore incomplètes, l'austérité est clairement présente dans tous les secteurs, y compris dans l'enseignement supérieur et la recherche (ESR).
Une « sanctuarisation » qui n'en est pas une !
Le projet de budget pour l'ESR a été présenté par la ministre et la secrétaire d'état comme un « bon budget », avec une augmentation affichée de 45 millions € par rapport au budget initial de 2014, soit environ 23,05 milliards €. Mais cette augmentation est ramenée par le dossier de presse officiel à 36 millions € (en raison de transferts d'emplois et moyens à l'ESR agricole). Or avec une prévision d'inflation à 0,5 %, pour parvenir à un budget seulement équivalent à celui de 2013, pourtant largement insuffisant pour répondre aux besoins de l'ESR, il aurait fallu au moins 115 millions € d'augmentation...
Par ailleurs, dans la présentation du budget 2015, les crédits de la MIRES inscrits au PLF 2015 (englobant ceux du secrétariat d'état à l'ESR et ceux d'autres programmes) sont de 25,7 milliards € hors CAS pension, soit 30 millions € de moins que dans la loi de finances initiales de 2014, à structure constante !
Selon le dossier de presse du PLF2015, « l'optimisation de la gestion financière du secteur de l'enseignement supérieur » devrait rendre possible une nouvelle « contribution au redressement des finances publiques à hauteur de 100 millions € » . Sur quelles bases cette contribution sera-t-elle établie ? Viendra-t-elle en déduction ou en supplément de la mise en réserve automatique de 6 % des crédits de fonctionnement et de 0,5 % de la masse salariale ?
Si nous ne pouvons que nous réjouir de l'augmentation du budget « Vie étudiante » de 42 millions €, principalement consacrée aux bourses étudiantes, il en est tout autrement pour le budget de la recherche. En effet, malgré l'affirmation de la sanctuarisation du budget de la recherche, le PLF 2015 affiche une baisse de plus de 6 millions € sur les programmes finançant les principaux organismes de recherche !
Beaucoup de questions sont sans réponse à cette heure, il faudra attendre d'avoir les documents plus détaillés pour préciser l'ampleur du « jeu de bonneteau » sur les chiffres.
Le jeu pipé des 1000 emplois
Le programme « Formations supérieures et recherche universitaire » diminue de 5 millions €. Il inclut les 1000 emplois « créés », dont le financement exige 58 millions de masse salariale. Ce qui implique une baisse réelle des dotations de fonctionnement d'un montant au moins équivalent à 63 millions d'euros. Les financements pour ces nouveaux emplois seront donc utilisés pour compenser la faiblesse des dotations et, par exemple, payer les personnels déjà en poste, car l'augmentation mécanique de la masse salariale due au "GVT" n'est que partiellement prise en compte dans les budgets... Ainsi, l'IGAENR préconise à l'université de Marne la Vallée de geler la totalité de ses postes vacants et nouveaux, comme cela a été pratiqué à Angers en 2014. Globalement, selon la Cour des Comptes, entre 2012 et 2013, le nombre d'emplois effectivement « consommés » par les établissements d'enseignement supérieur a diminué de 900 équivalents temps plein !
En outre, sur ces 1000 emplois, 361 sont prévus pour les regroupements (COMUE), sans garantie que ces nouveaux établissements soient en mesure de les utiliser. Notons au passage que le ministère prévoit également, grâce aux regroupements, de faire une économie de 123 millions € par « la réorganisation du mode d'allocation des moyens des universités autour des sites où se mettent en place des synergies entre universités et organismes de recherche ».
Menaces sur les budgets d'investissement
Les négociations entre l'Etat et les régions sur les contrats de plan pour la période 2015-2020 font apparaître que les crédits CPER qui seront consacrés à l'ESR sont ceux qui subissent la plus forte baisse, passant à 950 millions contre 2,9 milliards auparavant, selon A. Rousset pour l'Association des Régions de France.
Avec les 3,7 milliards d'économies imposées aux collectivités territoriales dans le cadre du PLF 2015, (11 milliards au total jusqu'en 2017), celles-ci risquent de ne plus être en mesure de contribuer au financement de l'ESR.
Par conséquent, les partenariats public-privé (PPP) risquent de revenir à la mode. Pour preuve, malgré les annonces de G. Fioraso sur la nécessité de cesser le recours aux PPP, grevant à terme les budgets des établissements, il est à nouveau prévu deux PPP parmi les quatre investissements annoncés par le ministère.
"L'objectif de réussite du plus grand nombre va de pair avec celui tendant à améliorer l'attractivité de notre système d'enseignement supérieur" affirmaient triomphalement nos deux ministres de tutelle lors de la conférence de rentrée universitaire 2014/2015 qui s'est tenue le 24 septembre 2014.
Les moyens budgétaires accordés sont décidément bien loin de ces ambitions !