Université de Lille :
communiqué des sections locales FSU
28 septembre 2020
Cette rentrée universitaire ne ressemble pas aux autres, c’est un fait. La crise sanitaire est passée par là et aggrave considérablement les conditions de travail.
Ainsi le plan de retour à l’activité (PRA 2) de notre université, destiné à faire respecter les mesures sanitaires indispensables, s’avère inapplicable sur bien des aspects, variables selon les composantes : salles de TD bondées, fenêtres condamnées, équipement d’enseignement à distance rudimentaire ou inexistant, insuffisance (voir absence) de nettoyage des locaux faute de personnel… Où l’on voit que le gigantisme ne rime pas avec « agilité », pour parler comme nos « managers » (et devient un handicap en cas de crise) !
Les étudiants, pour certains dans des conditions sociales fortement paupérisées, voient leur facture s’alourdir avec le prix des masques. Ne parlons pas de la restauration : il suffit d’aller faire un tour devant les resto U ou les points de vente du CROUS pour constater de visu quelles conditions déplorables on offre aux étudiants et aux personnels.
Cette dégradation des conditions de travail rentre directement en collision avec les précautions sanitaires qui devraient prévaloir : nous rappelons ici, comme cela a été dit déjà aux participant·e·s à l’heure d’information syndicale CGT-FSU du 16/9, que l’employeur – même public ! – n’a pas le droit de mettre en danger la santé des personnels, ni celle des usagers. Les personnels, titulaires ou contractuels, se retrouvant dans une situation dangereuse pour leur santé et celle des usagers, peuvent exercer leur droit de retrait : en savoir plus
Ce droit de retrait n’est pas la solution magique, mais ce n’est pas non plus la seule possibilité d’action des personnels qui ne veulent plus subir sans réagir!
Ici et là, à l’université, la révolte gronde et certain·es reprennent le chemin de l’action collective :
- à la FST, de nombreux collègues se sont regroupés pour dénoncer les conditions de travail qui leur sont faites. Vous pourrez lire ici la lettre adressée à la direction de l’Université par ces collègues et un inventaire des problèmes rencontrés
- à la FSES, le conseil de faculté, « considérant la fatigue, l’exaspération, l’écoeurement des collègues en résultante de cette dynamique mortifère, pense qu’il est temps de renverser radicalement la vapeur. C’est le bon moment. Avant que tout le monde craque, lâche prise ou démissionne de ses responsabilités » … et annonce le report à une date indéterminée de l’accomplissement de tâches bureaucratiques épuisantes.
La FSU salue ces initiatives et soutient les collègues dans leur lutte pour des conditions de travail dignes.
Mais tout cela n’est pas que le résultat des ravages de la pandémie…
À y regarder de près, cette crise de la COVID a été et reste un révélateur d’une crise multiforme, caractérisée essentiellement par des choix politiques et économiques, dont nous avons pu mesurer aussi au fil des ans les conséquences désastreuses en tant qu’acteurs et actrices de l’enseignement supérieur. Depuis 2005 et la loi d’orientation pour la recherche, consacrant le financement sur projet et l’évaluation permanente, et la loi « Liberté, responsabilité des universités » de 2007 permettant d’appauvrir les universités et de les lancer dans la course aux financements d’excellence, ces choix politiques successifs résolument managériaux impactent très négativement nos métiers et dégradent nos conditions de travail. Ils ont été dénoncés et combattus à l’époque, en particulier par les syndicats de la FSU (SNESUP-SNCS-SNASUB) qui avaient analysé les textes et anticipé leurs effets délétères à venir. Mais ils sont toujours répercutés docilement par des directions d’Université élues dont la ritournelle du « on ne peut pas faire autrement » a toutefois de plus en plus de mal à passer.
Ainsi, malgré toutes les alarmes faites de longue date par la FSU (et d’autres organisations syndicales) à tous niveaux sur le ras-le-bol prévisible des collègues mis·es en situation de travail empêché, alors que la fusion des 3 universités est en partie responsable de cette dégradation observée localement, la direction de l’Université continue à marche forcée à vouloir nous imposer la création de « l’établissement public expérimental » (alias EPE) pour fin 2021. C’est à dire un établissement encore plus grand (université de Lille + écoles externes), encore moins gérable, encore plus inhumain… et à la structure décisionnelle opaque ressemblant de plus en plus à celle des universités américaines : encore plus d’extérieurs, encore moins de représentants des personnels et usagers. Nos élu·e·s ont encore alerté au congrès des conseils du 23/9 dernier sur les effets néfastes pour les personnels et le service public que cela va entraîner. En savoir plus sur ce projet
La lutte contre la fusion des universités lilloises n’a pas été massive en son temps, et chacun·e en paie le prix au quotidien depuis presque 3 ans. Laisserons-nous faire cette nouvelle restructuration qui - c’est facile à prévoir au vu des expériences passées - n’améliorera pas le fonctionnement du service public d’enseignement supérieur et de recherche ni nos conditions de travail ?
Enfin au niveau national, le gouvernement maintient son projet de loi de programmation pour la recherche (LPPR) fortement dénoncé et combattu dans le milieu depuis un an. Notre ministre exerce un chantage inadmissible sur les organisations syndicales en associant projet de loi LPPR et revalorisation des rémunérations pour certains personnels (pas tous), en échange de l’augmentation de la précarité des jeunes collègues. Là encore de fortes résistances voient le jour comme celle du CoNRS, qui souhaite connaitre l'opinion des collègues sur cette loi et soumettre la question de l'opportunité de sa démission, pour produire un électro-choc dans l'opinion, via un questionnaire (qui nécessite moins de 3 minutes) et que nous vous invitons à remplir.
À noter que Le Conseil Économique, Social et Environnemental vient de voter à l'unanimité le 22/09/2020 un avis très critique de la LPPR (161 voix pour, 0 contre, 1 abstention) . Extrait : « Le Cese alerte sur la menace lourde de conséquences pour notre pays, d'une LPPR et d'un Pacte Productif qui se conjugueraient pour accentuer encore des orientations à l'œuvre dans la recherche publique depuis plus de 15 ans. Ce choix politique d’une recherche publique principalement orientée sur les stratégies des marchés porteurs, menace notre potentiel scientifique national et avec lui, plusieurs générations de chercheurs et de chercheuses dont toute nation a besoin. La recherche est un bien collectif essentiel qui ne peut être piloté par des stratégies de rentabilité immédiate. ». Voir l’avis complet
Et si vous veniez rejoindre et renforcer un syndicat de la FSU pour que les luttes s’organisent à tous niveaux, en vue d’arracher les moyens de travailler dans de bonnes conditions au service de l’intérêt général ?