Passage en force de la LPR aggravée en période de confinement…
Dans un contexte sanitaire et social particulièrement tendu, la loi de programmation de la recherche a été adoptée le 17 novembre par l’Assemblée nationale. Aggravée encore par les amendements de dernière minute adoptés par le Sénat avec l’appui d’une ministre qui a de fait perdu toute légitimité, cette loi entérine un projet destructeur du service public d’Enseignement Supérieur et de Recherche. Frédérique Vidal, plutôt que de défendre les personnels sous sa tutelle, a dépensé toute son énergie à faire passer en force la LPR largement contestée. Aucune crédibilité ni confiance ne peut plus lui être accordée.
Malgré une contestation quasi-unanime de la communauté universitaire, la suppression de la qualification par le Conseil National des Universités (CNU) avant tout recrutement de PU, et l’expérimentation de la même procédure rendue possible pour les MCF, sont désormais inscrites dans le projet de loi adopté par l’Assemblée nationale. Cette mesure, exclue des discussions par la même ministre et n’ayant donc fait l’objet d’aucun débat au sein de la communauté universitaire ni avec ses représentant·es dans les instances dédiées (CTU, CTMESR, CP-CNU, CNESER) révèle une conception plus que réductrice de la concertation. Le délit d’entrave vient s’ajouter à la liste déjà longue des amendements contestés et remet potentiellement en cause les libertés universitaires, la liberté d’expression et la liberté syndicale dans un contexte où les droits fondamentaux sont par ailleurs fortement attaqués, notamment dans le cadre du projet de loi “sécurité globale”. Une fois votée par le Sénat vendredi, la LPR devrait être étudiée par le Conseil constitutionnel, saisi par des groupes parlementaires ayant déjà fait savoir leur opposition au texte.
Une contestation largement visible
En amont du vote de l’Assemblée nationale, les initiatives se sont multipliées pour contester la LPR et les amendements ajoutés par le Sénat : manifestation le 13 octobre, pétitions, tribunes, rassemblement le 28 octobre devant le Sénat, opération “écrans noirs”, assemblées générales, motions de laboratoires, de CA et de la plupart des sections CNU, etc. À Paris, la journée du 17 novembre a été marquée par un rassemblement place de la Sorbonne qui, malgré les conditions sanitaires, a regroupé plus d’un millier de personnes. Le boycott du CNESER du 18 novembre par la quasi-totalité des organisations syndicales a entraîné le report de la séance.
Cette mobilisation doit s’étendre pour que la LPR reste lettre morte et que les décrets d’application ne soient pas publiés.
L’université devient une ville fantôme
Cet épilogue parlementaire de la LPR, ce coup de force inédit du gouvernement contre l’ESR, arrivent alors que l’université est majoritairement passée en mode dégradé, depuis le reconfinement du 30 octobre, avec ici et là quelques TP dérogatoires et partout ailleurs des enseignements à distance. Les inégalités de traitement se creusent entre les établissements, entre certaines disciplines et filières. Les étudiant·es subissent un véritable préjudice par rapport à ceux/celles de classe préparatoire et BTS où les cours se poursuivent en présence des étudiant·es. Leur détresse sociale et psychologique a également de lourdes conséquences sur leurs conditions d’étude.
Subrepticement, les conditions de travail se dégradent sans que cela ne soit toujours visible, sans qu’aucun aménagement matériel ni de services d’enseignement n’ait été envisagé. Chacun·e reste chez soi face à un écran dans des activités numériques, chronophages, épuisantes physiquement et nerveusement, sources de décrochage en termes de recherche. Le sentiment d’isolement grandit chez les collègues et les étudiant·es. Face à cette réalité, le SNESUP-FSU appelle à préserver des moments de déconnexion, le travail collectif, à maintenir coûte que coûte le lien avec les collègues et les étudiant·es. Il demande que l’organisation du déconfinement et le retour progressif au “présentiel”, dans des conditions sanitaires sécurisées, soit anticipé dès maintenant afin d’éviter de subir des décisions prises du jour au lendemain et pour que l’université redevienne un lieu de vie, d’études et de travail.
La démocratie tend aussi à devenir de plus en plus “virtuelle” au sein de nos établissements. Elle se dégrade gravement. Beaucoup de décisions sont prises sans concertation par les équipes de direction au prétexte de l’urgence. Le renouvellement des conseils en ayant recours au vote électronique, avec les risques qu’il comporte concernant la sincérité du scrutin et l’impossibilité pour les candidat·es de faire véritablement campagne, contribue à l’affaiblissement de nos institutions. Dans ce contexte, les résultats encourageants obtenus par les listes soutenues par le SNESUP-FSU sont autant de points d’appui pour porter et affirmer partout nos valeurs.
Un budget qui ne permet pas d’entrevoir des jours meilleurs
La loi de programmation de la recherche ne répond pas à nos attentes sur le plan budgétaire. En plus de ses “marches” budgétaires qui ne représentent que 400 M€ par an dans le budget de la MIRES, il faudrait environ 1,5 milliards d’euros supplémentaires pour, simplement, espérer « stabiliser » la situation des établissements de l’ESR public.
Outre l’urgence d’une compensation des dépenses occasionnées cette année par la crise sanitaire qui n’ont été que partiellement prises en compte dans la dernière loi de finances rectificative, le SNESUP-FSU réaffirme celle d’un plan pluriannuel de recrutements de 65 000 postes titulaires sur 10 ans dont 8 500 créations de postes pour l’année 2021 tous corps confondus.
La ministre use et abuse des effets d’annonce : les 26 M€ annoncés ne permettront de financer que 4000 places au lieu des 10 000 qu’elle a affichées dans le cadre du plan de relance, le budget 2021 des établissement n'augmentera que de 1% et parmi les surcoût dus à la crise sanitaire en 2020, moins de 10% seront pris en charge, à peine de quoi permettre le prolongement des contrats doctoraux. Nous devons également continuer à exiger des moyens supplémentaires lors des votes sur les budgets dans les conseils centraux des universités.
Le SNESUP-FSU appelle à participer à la réunion nationale de Facs et Labos en lutte le 23 novembre (voir détails ici).
Le SNESUP-FSU appelle à étendre la mobilisation contre la LPR, pour la défense du CNU, pour préserver les libertés universitaires et plus largement pour un service public de l’ESR ouvert à toutes et tous.