Texte préparatoire pour la commission du thème 3
Depuis 2012 les budgets de l'enseignement supérieur et de la recherche stagnent alors que les effectifs étudiants s'accroissent significativement. L’État a profité du passage aux responsabilités et compétences élargies pour se désengager et ne pas assurer les besoins consécutifs à cette hausse, aux regroupements imposés, à l'inflation et à l'augmentation de la masse salariale du fait de l'amélioration de la qualification du personnel et du recul de l'âge de départ en retraite. Cette asphyxie financière a des conséquences directes néfastes sur l'emploi, tant qualitativement que quantitativement, et sur les rémunérations. Elle provoque des tentatives répétées de grignotage des statuts des enseignants et des enseignants-chercheurs. Elle contribue avec le développement des politiques de financement sur appels à projet, de mise en concurrence, d'individualisation des rémunérations et des carrières, la mise en place de hiérarchies intermédiaires et des restructurations incessantes, à la dégradation sensible de nos conditions de travail. L'exercice de nos missions d'enseignement et de recherche est rendu plus difficile et peut même être empêché; Les risques sur la santé des agents sont de plus en plus présents.
La CPU, jouant le rôle du MEDEF dans l'ESR, a présenté récemment des propositions à l'adresse du futur gouvernement : affaiblissement des garanties nationales (disparition de la qualification et des dispositions de mutation pour rapprochement de conjoint), renforcement des prérogatives locales, glissement vers un statut de type fonctionnaire territorial. Leur mise en œuvre maltraiterait encore plus les personnels.
Emploi statutaire et non titulaire
Le nombre d'enseignants-chercheurs et enseignants titulaires en fonction dans le supérieur diminue depuis 2013 en dépit des annonces ministérielles annuelles de création de 1000 postes dans les établissements comme de la loi du 12 mars 2012, dite loi Sauvadet, censée réduire la précarité et favoriser l'emploi titulaire. En 2015/16 les enseignants moins nombreux qu'en 2011/12 ont eu à former près de 100 000 étudiants de plus dans l'enseignement supérieur public. Les gels de postes persistent alors que l'accroissement des effectifs étudiants va se poursuivre de la même manière jusqu'en 2020 et dans une moindre mesure les cinq années suivantes. Le fonctionnement des départements d'enseignement repose de plus en plus sur des chargés d'enseignement, encore plus précaires que les contractuels, et non comptabilisés dans les statistiques.
Les besoins en emploi que nous évaluons sont réels mais comment rendre visible cette question dans le débat public ? Comment réaffirmer la priorité à l'emploi statutaire face aux projets politiques de développement d'emplois sur contrat, qui offre des conditions avantageuses pour quelques élus et engendre la précarité pour le plus grand nombre ?
Hors quelques coordinations les non-titulaires restent isolés et peu visibles dans nos établissements. Leurs conditions d'emploi et de travail contribuent à tirer vers le bas celles des titulaires. L'implication de ces derniers dans la défense des droits et l'amélioration des situations des non fonctionnaires, et donc de tous, est indispensable. Comment, à tout niveau (département, laboratoire, composante, établissement, COMUE, national) combattre la précarité ? Faut-il participer à alimenter le système par le recrutement et la gestion de contractuels et de vacataires ? Notons de plus que beaucoup de non titulaires sont jeunes, ce qui fait des questions de précarité un enjeu essentiel pour les syndicats et l'action syndicale future.
Carrières, rémunérations, évaluation, obligations de service, retraite
La revalorisation de nos métiers faisant suite au protocole PPCR est appréciable mais ne suffit pas à renforcer leur attractivité d'autant plus que nos rémunérations souffrent de la faiblesse de nos régimes indemnitaires et de leur caractère particulièrement inégalitaire. Elle a de plus laissé sur le bas-coté la reconnaissance du doctorat. Nous devons en faire collectivement le bilan. Sa mise en place soulève des questions importantes sur les promotions, leur procédure et les critères d'évaluation. Il est primordial de développer des propositions pour traduire dans les faits le principe d'une carrière sur au moins deux classes, tout particulièrement chez les EC pour lesquels aucun mécanisme n'existe actuellement. Quels moyens pouvons-nous en outre proposer pour que les activités collectives soient prises en compte dans les opérations de gestion de carrière ?
La CPU vient de proposer de passer à une gestion totalement locale des enseignants de statut second degré. Quel impact sur les carrières pourrait résulter d'une mise en œuvre de cette mesure ?
Moins de la moitié des sections CNU mettront en place le suivi de carrière cette année. Si la CP-CNU a obtenu l'an dernier que celui-ci soit essentiellement qualitatif et qu’une restitution soit réservée en exclusivité à l’intéressé, notre syndicat est resté mobilisé contre la procédure qui ne répond pas à ses mandats de 2015. En réaction la CPU a demandé une mise en oeuvre, y compris par-dessus le CNU, en développant une conception du suivi de carrière très managériale. Comment résister à ces visées ?
Les collègues s'interrogent souvent sur leurs obligations relativement à un enseignement ou une responsabilité pédagogique (par exemple en temps de présence dans l'établissement). L'activité d'enseignement se pratique sous des formes qui se sont diversifiées. Quelles garanties statutaires sur le décompte des services sont-elles susceptibles de prendre en compte à sa juste valeur le travail réalisé ?
Dans l'exercice de notre métier toute une partie du travail est invisible. Comment la faire apparaître et la formaliser, ce qui viendrait en appui de nos demandes de réduction d'obligations de service.
Enfin, de nombreuses questions relatives à la retraite et aux retraités sont à étudier : l'impact de la suppression de la validation des services de non titulaires sur le montant de la pension future, les possibilités de poursuite d'activité, la protection sociale et la politique de santé, ...
Droit à la recherche
L'exercice du droit à la recherche, dont le SNESUP réaffirme le caractère fondamental, implique que chacun dispose de moyens et de conditions de travail permettant de mener cette mission. Cela suppose des crédits récurrents suffisants. Pouvons-nous préciser des conditions de mise en œuvre effective du droit à appartenir à une équipe et permettant de disposer d'infrastructures d'une structure de recherche ? De plus, des EC ne sont plus en mesure d'exercer leur mission de recherche, frappés par une mesure de rétorsion ou l'exclusion de leur laboratoire, souvent abusive.
Les modifications des statuts des EC en cours prévoient qu'un recrutement peut être annulé si la recherche doit se faire dans une zone à régime restrictif (ZRR) et que le lauréat n'est pas autorisé à y accéder. Plus généralement il serait intéressant de produire un état des lieux des problèmes rencontrés par les EC suite à l'instauration des ZRR.
Conditions de travail
Nous espérons disposer d'ici au congrès d'une première analyse des résultats de l'enquête en ligne du SNESUP.
Les évolutions statutaires successives des enseignants-chercheurs et enseignants ont conduit à élargir les missions et à alourdir leur travail, ce qui justifie nos revendications d'allègement des services.
Une facette de la dégradation des conditions de travail est l'augmentation importante des pratiques abusives et des conflits qui se traduisent par des appels au secteur Situation Des Personnels. Les problèmes peuvent être d'ordre collectif, souvent parce que l'établissement vise des économies, par exemple en décomptant des cours comme des TD. D'un point de vue individuel, ce sont les exclusions et mises à l'écart, les sanctions déguisées, la serrure du bureau changée, la mise en sous-service, les manquements à la protection fonctionnelle,… La rédaction d'un recueil de témoignages sur ces pratiques d'exclusion inacceptables est envisagée. Quel type d'utilisation en faire ? Pouvons-nous dessiner une gestion de ressources humaines alternative sur des bases collégiales ?
La situation interroge sur l'efficacité de la politique de diffusion de « bonnes pratiques » du ministère et des dispositifs de médiation des établissements. Lorsqu'ils existent, les médiateurs sont-ils suffisamment indépendants et formés, leur action bénéficient-elle aux agents ?
Les CHSCT rencontrent des difficultés à assurer leurs missions. En particulier l'administration a les moyens de passer en force lorsqu'il y a désaccord avec l'administration. Pour ce cas, l'alignement sur le code du travail, où l'employeur doit s'adresser au tribunal pour aller contre les décisions du CHSCT, est une revendication à considérer.
La pénurie criante de médecins du travail appelle des mesures qui pourraient s'articuler avec des revendications relatives au nombre et à la formation des personnels de santé pour satisfaire aux besoins de santé dans notre pays. La spécialité de médecine du travail étant parmi les moins choisies, le rôle et la rémunération de ces médecins doivent être interrogés.