Texte de problématique pour la commission Thème 1: Notre organisation syndicale et sa contribution à la démocratie universitaire. Rôle des organisations syndicales dans la restructuration de l'ESR; rôle des syndicats dans la vie démocratique ; démocratie universitaire et démocratie syndicale; adéquation du fonctionnement de notre syndicat dans le périmètre politique de restructuration de l'ESR
Démocratie universitaire
L'article L711-1 du code de l'éducation dispose que les établissements d'enseignement supérieur publics sous statut d'EPSCP1 « sont gérés de façon démocratique avec le concours de l'ensemble des personnels, des étudiants et de personnalités extérieures. ». Les réformes récentes (lois Pécresse et Fioraso) dénaturent l'esprit de cet article, issu de la loi de 1984.
La représentation des personnels et étudiants est fixée par diverses dispositions législatives et réglementaires du code de l'éducation, en fonction des types d'EPSCP concernés, ainsi que du niveau de gestion (établissement, composantes, laboratoires, départements, etc.). Une partie en est toujours désignée par des élections.
Il est néanmoins patent que cette gestion démocratique est actuellement très déficiente, à de nombreux niveaux : l'existence de prime majoritaire à la liste arrivée en tête dans les collèges des enseignants-chercheurs et enseignants du conseil d'administration des universités entraîne une quasi-disparition de la diversité des points de vue, laissant au mieux une opposition réduite et parfois discréditée lorsqu'elle s'exprime. Le comportement des collègues et des élu.e.s se révèle régulièrement un facteur d'aggravation des défauts du système : les élu.e.s sur des listes majoritaires n'osent pas s'opposer aux textes mis au vote par les président.e.s. Certains votent sans avoir eu communication des documents. La participation des membres extérieurs est pour l'essentiel sous le contrôle des président.e.s, souvent sous forme de procuration. Le désintérêt de la plupart des collègues de ce qui se passe dans les instances conforte les attitudes peu responsables au regard de l'importance des enjeux Quand les personnels ou les étudiant .e.s envahissent les conseils pour se faire enfin entendre, il arrive de plus en plus souvent qu'ils en soient chassés par la police. En outre, le développement des conseils de directeurs de composantes ou de laboratoires tend à prendre le pas sur les instances élues en matière de prise de décisions, sans compter les « chargés de mission » qui ne rendent pas nécessairement compte devant les conseils.
Enfin, les nouveaux types d'établissements annoncés à l'occasion des appels à projet d'excellence - qui ne sont pas nécessairement des fusions intégrales des établissements concernés (comme par exemple à Nantes ou Marne-la-Vallée) - vont vraisemblablement avoir des impacts sur les conseils des établissements impliqués dans le projet, qui n'amélioreront peut-être pas leur fonctionnement.
1 Quelles revendications porter pour améliorer le fonctionnement démocratique?
Comment obtenir que la loi s'applique en matière de publication des documents issus des instances (avis CHSCT, relevé des décisions, documents adoptés par les instances et PV des instances), que les documents préparatoires et ordre du jour des instances soient accessibles à tous les personnels et étudiants ? Doit-on limiter les mandats des présidents (dans le temps et dans l'espace universitaire)? Doit-on accepter le vote des personnalités extérieures pour l'élection du président?
2. Cela peut également poser aux organisations syndicales la question de leur participation ou non en tant que telles aux élections locales et de leurs actions syndicales dans les conseils (Conseil d'administration (CA), conseil académique (CAC), conseil d'école des ESPÉ, conseils d'UFR, de département, de laboratoire…). En particulier, selon les dispositions en vigueur dans certains types d'EPSCP ou de composantes, les représentants élus des personnels et étudiants sont minoritaires par définition, en raison du poids des représentants des directions des établissements ou de l'administration rectorale et des extérieurs (cas des ESPE, des COMUE). Faut-il alors aller aux élections avec des listes syndicales dans des instances où les élu.e.s sont minoritaires, au risque d'épuiser les forces militantes dans des réunions où tout est joué d'avance? Néanmoins, ce sont des lieux où s'élaborent des décisions concernant les personnels dont les organisations syndicales ont besoin d'être informées, pour pouvoir informer les collègues, à défaut de pouvoir vraiment peser sur leur contenu. D'autre part, des élu.e.s, même minoritaires peuvent ponctuellement faire basculer les rapports de force. Faut-il alors préférer une position intermédiaire consistant à présenter des listes, mais à envoyer à chaque séance le minimum d'élu.e.s, avec procurations?
Plus largement, quel peut être le rôle du syndicat dans un système géré par ses personnels? La question se pose spécifiquement pour notre syndicat, syndiquant dans le champ des personnels ayant vocation à diriger les établissements : en cas de victoire de listes présentées ou soutenues par le SNESUP-FSU, la direction de l'établissement revient donc à des camarades ou sympathisant.e.s identifié.e.s comme tel.le.s par les collègues. Dès lors,
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comment renforcer face au ministère et ses chantages une équipe présidentielle soutenue par le SNESUP?
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comment garder la latitude de contester l'éloignement du programme d'une équipe présidentielle soutenue par le SNESUP-FSU, tout en valorisant les actions qui répondent à nos convictions ?
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comment maintenir une section syndicale revendicative et crédible qui défende les personnels dans le contexte d'une présidence soutenue par notre syndicat ?
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Faut-il préciser un cadre pour éclaircir les relations entre direction de l'établissement et section locale ?
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Devrait-on demander aux camarades en responsabilité dans la direction de l'établissement de se mettre "en sommeil" de l'activité syndicale de leur section et des instances nationales?
D'autre part, s'il est assez facile d'endosser son étiquette syndicale dans les conseils centraux, il n'en va pas toujours de même dans les conseils de composante ou de laboratoire : quel peut donc être le rôle des élu.e.s syndiqué.e.s dans ce type de conseils ?
Construction des contre-pouvoirs
« Pour qu'on ne puisse abuser du pouvoir, il faut que, par la disposition des choses, le pouvoir arrête le pouvoir. » (Montesquieu, « De l'esprit des lois »).
Bien qu'il ne fasse pas partie de la disposition des choses, puisqu'il n'existe pas partout, le syndicat est l'un des principaux outils dont disposent les personnels pour empêcher les dirigeants d'un établissement d'abuser de leur pouvoir. En dehors des conseils de l'établissement, comment travailler à renforcer le contre-pouvoir syndical indispensable à une gestion démocratique des établissements ?
Un outil syndical important pour œuvrer sur les conditions de travail est le CHSCT, souvent peu apprécié des directions notamment pour cette raison. Or les collègues savent à peine que ceci existe.
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Ne devrait-on pas exiger une campagne nationale d'information sur les missions, les procédures et les pouvoirs des CHSCT des établissements?
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Quelles modifications du décret CHSCT demander pour faciliter leur travail?
L'utilisation des messageries professionnelles par les organisations syndicales pour pouvoir communiquer auprès de tous les agents concernés est également un moyen de contre-pouvoir, garanti par un droit qui ne s'applique pas encore dans tous les établissements. Quels sont les obstacles rencontrés, et comment les lever ?
Les résultats aux élections professionnelles participent également de la reconnaissance des organisations syndicales, en particulier si le taux de participation est fort. Par ailleurs, les résultats obtenus au comité technique ministériel (CTMESR) déterminent les moyens syndicaux disponibles pour la FSU en terme de décharges pour activités syndicales, tandis que ceux au comité technique local (CT) déterminent entre autres la composition du CHSCT. Or la participation des personnels BIATSS au vote pour le CT local et le CTMESR est forte, souvent parce que se tiennent simultanément leurs élections de CAP ou CPE, qui s'occupent des questions de carrière, tandis que celle des enseignants-chercheurs et enseignants est faible.
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Comment améliorer le taux de participation de notre base électorale ?
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Faut-il demander que l'élection au CNU ait lieu au même moment que les élections professionnelles?
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Le vote pour le CNU restant un vote par correspondance par voie postale, cela ne garantirait peut-être pas que les collègues se déplacent aux urnes pour voter localement. Quel bilan faisons-nous de l'attribution au CAc et non plus au CA de la gestion des RH dans les établissements ? Ne devrait-on pas revendiquer des commissions paritaires d'établissement pour les promotions locales des enseignants-chercheurs, réservées aux organisations syndicales comme les CAP et CPE?
La formation syndicale est un élément qui peut contribuer à renforcer le syndicat et donc le contre-pouvoir qu'il constitue. Cette formation est souvent souhaitée, mais lorsque des sessions sont proposées à Paris, la participation est réduite.
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Quelles modalités permettraient de développer la formation syndicale ?
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Faut-il privilégier la formation de formateurs par la direction nationale ? Quels outils développer ?
Démocratie syndicale
Comment dynamiser et faire vivre la démocratie dans nos sections locales et au sein de nos instances nationales ? Peut-on envisager des éléments d'incitation à la rotation des mandats, aussi bien au niveau local qu'au niveau national pour favoriser le renouvellement?
Pour 2016, 57 % de nos syndiqué.e.s étaient des hommes contre 43 % de femmes. Par ailleurs, 67 % des décharges accordées pour prise de responsabilités syndicales au SNESUP ont été accordées à des hommes contre seulement 33 % à des femmes. Comment amener ces dernières à se syndiquer davantage et à favoriser ensuite leur prise de responsabilité ?
Un enjeu syndical important concerne en particulier aussi les retraité.e.s, en matière d'élaboration des revendications et du soutien à y apporter. Comment organiser les retraité.e.s ?
Notre syndicat reconnaît par ailleurs l'existence des tendances, et la désignation de sa direction nationale se fait sur cette base, au moyen du vote d'orientation.
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Cette organisation est-elle encore adaptée aux enjeux auxquels nous sommes aujourd'hui confrontés ?
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Si non, de quelle manière alors désigner nos instances nationales ?
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Si oui, comment et dans quel cadre peuvent s'exprimer les tendances ?
Un point important concerne également l'adéquation du fonctionnement de notre syndicat dans le périmètre politique de restructuration de l'ESR: les périmètres administratifs mouvants au gré des restructurations imposées ne permettent pas d'envisager une structuration du syndicat répondant à celle de l'administration, comme c'est le cas dans d'autres syndicats de la FSU. Même le découpage académique n'a pas forcément de sens pour les universités, qui peuvent parfois être implantées sur plusieurs académies ; le niveau régional devient de plus en plus prégnant en matière de « pilotage » de l'enseignement supérieur et de la recherche, mais par exemple des COMUE sont à cheval sur plusieurs régions.
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Comment se structurer à ces niveaux sans perdre de vue l'objectif de proximité avec les collègues ?
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Comment favoriser l'activité syndicale en fonction des périmètres concernés, comment désigner les interlocuteurs légitimes à des niveaux dépassant les établissements et comment régler les cas de désaccord qui peuvent survenir?
D'autre part, pour une meilleure efficacité et une réflexion élargie, il semble important de favoriser les échanges d'information entre la direction nationale et les structures locales. Comment formaliser une représentation des sections dans la direction nationale et la désigner démocratiquement ?
Par ailleurs, le travail militant dans les diverses instances se fait de plus en plus fréquemment dans un cadre fédéral, actuellement peu défini. L'article 11 des statuts de la FSU prévoit le cas, sans précision : « Elles [les sections départementales FSU] favorisent, à cet effet, la création et l'existence de structures fédérales locales et s'efforcent de les associer à la vie fédérale départementale. ». Comment aider à développer ce travail fédéral, impliquant dans notre champ principalement le SNASUB, le SNCS, le SNEP (et parfois le SNETAP), à l'interne des établissements et entre établissements lorsque nécessaire, et à le rapprocher des structures fédérales pour une meilleure prise en compte par la FSU des enjeux dans l'enseignement supérieur et la recherche ?
Enfin, la FSU a des mandats fédéraux d'unification syndicale, notamment de rapprochement avec la CGT et Solidaires 2 : comment les déclinons-nous au niveau de l'enseignement supérieur et de la recherche ?
Notes:
1Établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel
2Congrès du Mans, 2016, Thème 4, I-3-c : Nous nous situons dans une démarche qui propose aux organisations et aux salarié-es qui le souhaitent de débattre ensemble, à tous les niveaux, de la construction d’un nouvel outil syndical et des étapes qui peuvent y conduire, permettant une avancée vers l’unification du syndicalisme.
La FSU s’engage dans cette dynamique sur la base d’objectifs clairs : il s’agit de contribuer, dans le respect de l’indépendance syndicale, au développement d’un syndicalisme de lutte et de transformation sociale progressiste, à vocation majoritaire, porteur de propositions offensives et novatrices, attaché à construire les mobilisations et les rapports de force nécessaires pour faire aboutir ses revendications.
A cet effet, la FSU entend poursuivre et accentuer son travail avec la CGT et Solidaires, sans mettre de limites sur les forces qui pourront participer à cette construction. Cette démarche doit être appliquée à tous les échelons de la vie syndicale, du national au local, de l’interprofessionnel au catégoriel. Elle articule la mise en place de formes d’actions unitaires et d’un travail d’analyse et d’initiative communs (formation, documents communs, initiatives en direction des autres OS…) Elle peut se concrétiser par une forme d’association entre nos structures syndicales.
C’est par un travail intersyndical, inter fédéral régulier, à tous les niveaux, mais notamment au plus près du terrain, sur des dossiers concrets, en lien permanent avec la recherche d’action commune, que nous arriverons à dépasser les différences d’appréciation, les réticences, les a priori et à construire du commun. Cela passe par un travail à des collaborations entre organisations, plus étroites et plus permanentes, en avançant avec celles qui le souhaitent, sans exclure quiconque. Cela nécessite notamment d’impulser à tous les niveaux un débat sur les enjeux auxquels le syndicalisme est confronté dans notre pays, ses pratiques, ses stratégies. Les initiatives doivent se poursuivre et se multiplier, la construction de revendications communes et de coopérations pérennes doivent s’intensifier. Cela peut passer par l’élaboration d’un corpus revendicatif commun.