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Publié le : 26/06/2017

 

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Accéder et réussir en licence

 

Le SNESUP réaffirme sa vision d’une université dont l’objectif est l’émancipation intellectuelle des étudiant.e.s, en particulier le développement de la pensée critique, en tant qu’êtres humains et en tant que citoyen.ne.s. Dans un monde de plus en plus complexe, il est souhaitable qu’un nombre croissant de citoyen.ne.s aient accès aux études supérieures et à une qualification nationalement reconnue. L’université est à même de donner aux étudiant.e.s les armes intellectuelles pour transformer la société, par la capacité à raisonner, par les connaissances de base et les méthodes pour apprendre qu’ils auront acquises.

Les fonctions et finalités de la licence sont actuellement attaquées ainsi que les liens avec l’enseignement secondaire et avec le master par, entre autres, l’incitation toujours plus forte à la « professionnalisation ». En même temps que les débouchés de la licence et des autres formations post-bac, ce sont les conditions d’accès qui sont mises en cause à travers l’augmentation des frais d’inscription et la définition de capacités d’accueil s’accompagnant notamment de procédures de tirage au sort ou de définition de prérequis. Le lien avec le master s’étiole, l’idée selon laquelle tous les titulaires de licence n’ont pas vocation à poursuivre en master progresse. Le SNESUP-FSU rappelle que les formations de l’enseignement supérieur conjuguent poursuite d’études et insertion professionnelle. Les projets qui se précisent, aussi bien dans les préconisations de la CPU que dans le programme du nouveau président de la République, dessinent une licence dont les objectifs deviennent opposés, l’un visant l’insertion professionnelle immédiate, l’autre des poursuites d’études : modèles de bachelors, parcours technologique de grade de licence (PTGL) en IUT, licence générale devenant plus professionnalisante… On le voit, la licence fait l’objet d’une restructuration qui ne sera pas sans conséquences pour les prochaines générations et les besoins de la société.
Face à ces évolutions, le SNESUP redit sa vision émancipatrice de l’enseignement supérieur, au bénéfice d’étudiant.e.s acteurs et actrices de leurs formations. Il dit comment nous pouvons articuler démocratisation de l’accès aux études et amélioration de la réussite des étudiant.e.s, au sens fort que nous lui donnons, c’est-à-dire en leur permettant de devenir des professionnel.le.s autonomes et des citoyen.ne.s émancipé.e.s.

Le SNESUP-FSU réaffirme son opposition ferme à toute forme de sélection à l’entrée en licence. Il défend avec la même énergie la valeur de tous les diplômes, du baccalauréat au doctorat. Cela signifie que le baccalauréat, qu’il soit général, professionnel ou technologique (et le DAEU : diplôme d’accès aux études universitaires) doit permettre à tous ses détenteurs et détentrices de pouvoir poursuivre des études supérieures dans des conditions d’accueil dignes du service public. Défendre cette position, c’est faire des propositions pour continuer d’améliorer les conditions d’accueil dans les établissements et de mettre en place des dispositifs pour la réussite de toutes et tous. C’est aussi continuer d’exiger les moyens humains et matériels absolument nécessaires pour répondre à l’exigence de service public d’enseignement supérieur et de recherche.

 

1. Sur les moyens
Le SNESUP rappelle avec force que c’est une responsabilité nationale que de permettre à la jeunesse, mais aussi à l’ensemble de la société, de poursuivre des études à tous les niveaux et tous les grades universitaires. Depuis les RCE, ces responsabilités ont été reportées sur les établissements, les UFR ou les formations, ce qui n’est pas acceptable et nourrit le sentiment d’impuissance des collègues face aux flux d’étudiant.e.s en constante augmentation. Ouvrir largement l’accès aux études supérieures et avoir pour objectif une augmentation importante du taux de diplômés de niveau licence est un choix politique que doit faire la société et que les établissements d’enseignement supérieur publics, comme les lycées, doivent accompagner.

Or, depuis 2009, la croissance du nombre d’étudiant.e.s n’a pas été accompagnée par une hausse, programmée, pluriannuelle et cadrée nationalement, du financement de l’enseignement supérieur public à la hauteur des besoins et des enjeux d’élévation du niveau de qualification de nos concitoyen.ne.s comme préconisé par la Stranes. Et la rentrée universitaire 2016 aura été une rentrée encore très difficile avec une hausse de la démographie étudiante sur trois années de 100 000 étudiants supplémentaires dans un contexte de restriction budgétaire globale. Les conditions ne sont pas réunies pour permettre l’accueil des étudiant.e.s dans des bonnes conditions. Des inégalités de dotations très importantes subsistent entre établissements d’enseignement supérieur. Celles-ci ont même été renforcées par les financements extrabudgétaires des PIA. L’absence de moyens touche aussi les organismes de recherche avec la diminution des crédits récurrents de laboratoires et du nombre de postes qui s’accompagne d’une augmentation de la précarité.

 

2. Favoriser la réussite de tous les publics
Pour le SNESUP, la licence est une formation émancipatrice qui ne peut pas être réduite à une formation à des métiers. Comme tout diplôme universitaire, elle doit être adossée à la recherche, donner du sens aux savoirs, permettre d’intégrer les connaissances aux compétences, sans que ces dernières soient des outils exclusifs de définition et d’évaluation des diplômes.

Après le secteur de la recherche, c’est toute la formation universitaire qui fait désormais l’objet d’appels à projets via le programme de financement PIA3. Les « nouveaux cursus à l’université » et les « écoles universitaires de recherche » (EUR) qui y figurent poursuivent le mouvement de rupture entre licence et master, entre premier et deuxième cycle. Pour ce qui concerne les EUR, les universités essaient d’y émarger en espérant pouvoir basculer les moyens obtenus vers les autres masters. Or les EUR sont des formations concurrentes aux masters. Elles viendront déqualifier les licences car ce ne sont pas ces étudiant.e.s qui sont visé.e.s par « l’excellence » des EUR.
L’heure est à la défense du bac comme diplôme national et de la licence comme diplôme unique, accessible à toutes et tous et sans prérequis. La réussite étudiante est alors un enjeu majeur. Elle peut emprunter des chemins variés et complexes, courts ou longs, continus ou en reprise d’études, avec différentes combinaisons offertes par les offres de formation de l’ESR. Ce peut être un parcours « classique et linéaire » de type licence puis master, voire doctorat, mais ce peut être aussi un parcours initié par un BTS, un DEUST ou un DUT, poursuivi par une licence générale ou professionnelle ou bien d’autres possibilités encore. Le SNESUP-FSU propose des pistes pour favoriser cette réussite :

  • assurer la formation initiale et continue des enseignant.e.s du supérieur, dans laquelle les ÉSPÉ ont vocation à jouer tout leur rôle ;
  • recenser les expériences de réussite diverses mises en place dans les établissements, dont le SNESUP-FSU devrait pouvoir faire la synthèse ;
  • exiger des moyens en termes de personnels, de matériels, mais aussi donner les moyens aux étudiant.e.s de réussir, par exemple en réaffirmant le mandat d’allocation d’autonomie pour tous les jeunes et la gratuité des études ;
  • diversifier les méthodes pédagogiques sans tomber dans l’imposition de « bonnes pratiques » en matière de pédagogie dite « innovante » ou en termes de recours aux technologies numériques ;
  • réaliser une orientation efficace, construite sur le long terme, à la fois pré-bac et post-bac, avec des possibilités de passerelles entre filières. Ces passerelles doivent aussi être pensées entre les formations dispensées à l’université et celles relevant d’autres établissements, ce qui nécessite de développer les liens directs entre les équipes pédagogiques concernées. Cette orientation contrebalance la logique technico-administrative d’affectation des étudiants dans le supérieur à l’œuvre avec APB. Cela permet de passer d’une gestion impersonnelle des flux à une orientation centrée sur les projets des étudiant.e.s.

Le SNESUP-FSU est conscient du fait qu’il existe une grande hétérogénéité entre les étudiant.e.s néo-bacheliers et que les classes préparatoires sélectives exercent une concurrence vis-à-vis des universités. Il émet par conséquent les propositions suivantes concernant les étudiant.e.s qui réussissent le plus facilement :

  • une licence qui prendrait en compte que les étudiant.e.s puissent avancer à un rythme adapté ;
  • l’alignement des financements du premier cycle universitaire sur celui des classes préparatoires est une nécessité.

 

3. Accès à l’université
Les propositions de celles et ceux qui prônent la limitation de l’accès en première année de formation post-bac reposent sur deux types de « justifications » : les contraintes en termes de locaux, d’équipements, de personnels enseignants, qui s’expriment en « capacités d’accueil » ; l’adéquation du cursus antérieur et/ou des acquis effectifs à la formation sollicitée, qui s’exprime en termes de « prérequis » ou de « niveaux ». Avec APB, on observe également une sorte d’autocensure des étudiants, ceux-ci privilégiant les formations dans lesquelles ils estiment avoir plus de chances de réussir. La sélection n’est pas une solution acceptable :

  • historiquement, elle se pose toujours quand les effectifs se massifient et elle se trouve alors régulièrement associée à des mesures d’augmentation des frais d’inscription ;
  • elle est discriminatoire car ce sont les catégories socio-professionnelles défavorisées qui la subissent le plus, ce qui contrevient à la démocratisation de l’accès à la connaissance ;
  • elle est un outil de gestion de la pénurie des moyens et de mise en concurrence des établissements, des formations et des étudiant.e.s. Les prérequis sont eux-mêmes un moyen de faire des économies au détriment des étudiant.e.s qui ont besoin d’avoir plus de qualifications dans une société qui en demande toujours plus, et de gérer les flux des effectifs qui sont en augmentation constante depuis des années ;
  • accepter des prérequis, c’est d’ailleurs accepter la vision marchande des diplômes, le bac y compris, ce qui revient à les dévaloriser. C’est remettre en question le principe du bac, premier grade universitaire qui est un des moyens d’accéder à la licence ;
  • la sélection s’accompagne de la mise en place de capacités d’accueil auxquelles le SNESUP s’oppose en licence comme en master. Celles-ci conduisent à la mise en concurrence des formations, des étudiants, des collègues. Plutôt que de mettre en place des capacités d’accueil, c’est de moyens pour favoriser l’orientation, l’information objective et la réussite des étudiant.e.s dont nous avons besoin. Le SNESUP constate que des capacités d’accueil ont été instaurées pour l’accès en première année de master. Il rappelle que cela n’est pas obligatoire et qu’elles sont révisables chaque année, soit pour disparaître, ce que nous demandons, soit pour augmenter largement, de manière à excéder les demandes.

Lutter contre la sélection et pour des pédagogies adaptées aux différents publics, c’est aussi offrir aux étudiant.e.s, en formation initiale ou en reprise d’études, des alternatives avec un choix de mentions et de parcours dès la L1, mais aussi des passerelles s’ils viennent de STS ou d’IUT, à proximité de leur domicile. Cela pose la question du renforcement des mécanismes d’aides aux jeunes : APL, aide aux dépenses de transport et surtout allocation d’autonomie. Dans l’attente, il faut accroître le nombre de bourses et leurs taux en tendant vers une véritable politique d’accompagnement financier de toutes et tous les étudiant.e.s. Les dispositifs d’accompagnement financier en début de licence doivent être inscrits dans le projet d’établissement et soutenus par le MENESRI.

 

4. Pour le renforcement des articulations lycée-enseignement supérieur
L’arrivée dans l’enseignement supérieur est l’occasion pour les nouveaux bacheliers de s’ouvrir à de nouveaux et vastes horizons. Cela implique pour les néo-bachelier/ière.s des ruptures à deux niveaux : sur les enseignements et sur les méthodes de travail. Il est primordial d’accompagner ces néo-bachelier/ière.s par une articulation cohérente et forte entre le lycée et l’enseignement supérieur. Il s’agit, notamment, de développer des échanges sur les contenus des programmes et les pratiques pédagogiques et d’accueillir ces néo-bacheliers par des enseignements en groupes de taille raisonnable et en présentiel où le contact avec l’enseignant soit favorisé. Il est également nécessaire de tirer des bilans de cette articulation pour créer les conditions de réussite des étudiant.e.s, c’est-à-dire les préparer à ces changements et les accompagner ensuite durant la licence. Cela nécessite l’alignement des financements du premier cycle universitaire sur celui des classes préparatoires.

Le développement de l’articulation lycée-enseignement supérieur ne doit pas aboutir à la création de collèges universitaires découplés de la recherche, mais doit au contraire permettre à chaque étudiant.e de construire son parcours de formation pour sa réussite. Mais quelle réussite ? Le développement de l’articulation lycée-enseignement supérieur ne doit pas aboutir à la création de collèges universitaires découplés de la recherche, mais doit au contraire permettre à chaque étudiant.e de construire son parcours de formation pour sa réussite. Le développement de passerelles entre les formations et de liens entre leurs équipes pédagogiques ne peut que participer au développement de voies variées de réussite pour les étudiant.e.s.

Le SNESUP-FSU considère que tous les étudiant.e.s sont capables de réussir des études supérieures à conditions que les moyens (cf. ci-dessus) soient réunis.

Le SNESUP-FSU préconise une refonte de l’orientation à l’issue du baccalauréat, pour permettre à chacun de trouver une place dans la filière de son choix, adaptée à un projet personnel ambitieux et outillé, et bénéficier d’un réexamen des orientations au cours des deux premières années, grâce à des passerelles.

Qu’ils ou elles soient issu.e.s de filières générales, technologiques ou professionnelles, les bachelier/ière.s doivent pouvoir réussir dans l’enseignement supérieur. Le baccalauréat, premier grade universitaire, est la principale condition d’accès à l’enseignement supérieur public, sans prérequis supplémentaire. Le SNESUP-FSU a déjà fait des propositions de plus fortes implications d’universitaires dans la détermination des contenus de formations pré-bac, la préparation des sujets d’examen et la participation aux jurys. Un travail intersyndical avec l’ensemble des syndicats de la FSU doit être poursuivi.

À cette rentrée universitaire 2016, ce sont 13 500 étudiant.e.s (hors CPGE) de plus par rapport à celle de 2015 qui ont rejoint le cycle licence (6 000 de plus pour la L1) alors que pour la première fois depuis plus de vingt-cinq ans, l’effectif des maître/sse.s de conférences et des professeur.e.s des universités a baissé entre 2015 et 2016 ! Cette hausse démographique nécessite d’abord des recrutements statutaires de collègues et des moyens d’accueil dignes d’un service public. S’engager dans une politique de contrats ou de prérequis, autant de mesures qui s’inscrivent dans une logique de droit individuel, permettra-t-il de faire face à l’augmentation continue du nombre d’étudiant.e.s ? La réponse est non ! Ouvrir largement l’accès aux études supérieures et avoir pour objectif une augmentation importante du taux de diplômé.e.s au plus haut niveau possible de qualification sont des choix politiques que doit faire la société, que les établissements doivent accompagner et que l’État doit financer.

 

Pour : 48
Contre : 1
Abst. : 15
NPPV : 0