Avant qu’il ne quitte la pseudo-concertation sociale relative à la réforme de la licence lancée en avril, le SNESUP-FSU avait constamment réclamé le texte de l’arrêté licence et celui du cadre national des formations. Et c’est finalement au soir du mardi 19 juin que les textes réglementant la licence et le cadre des formations ont été envoyés aux membres du Comité de suivi de la licence, du master et du doctorat pour une séance de travail vendredi 22 juin avant présentation pour avis au Cneser du 9 juillet. Pourtant, les impacts à long terme qu’auront ces textes sur les conditions de travail des collègues, la structure des UFR et de leurs offres de formation, l’équilibre des personnels au sein des équipes pédagogiques, les cursus des étudiant.e.s, imposent de prendre le temps d’une véritable réflexion. Le calendrier de travail imposé par le MESRI ne permet pas aux organisations syndicales de consulter leurs adhérent.e.s et à l’ensemble de la communauté de l’ESR de prendre connaissance de ces textes. Il doit être revu.
D’un côté, cet arrêté licence remet en cause le coeur de notre métier par des prescriptions particulièrement détaillées : nos libertés académiques et surtout notre liberté pédagogique par l’obligation d’utiliser certaines pratiques pédagogiques. Cela n’est pas acceptable. D’un autre côté, il accumule les propositions floues et ambiguës, voire dangereuses, renonçant à tout cadrage national des diplômes au profit d’une autonomie totale des établissements dans leur mise en oeuvre : formes possibles de compensation, suppression ou non de la 2e session, absence totale de nombre d’heures minimum assurées en présence des étudiant.e.s ou encadrées à distance, rôle des milieux socioprofessionnels introduits systématiquement au sein des équipes pédagogiques comme acteurs à tous les niveaux de décision de la licence. Ces propositions peuvent ouvrir aussi la voie à des calculs des services d’enseignement « forfaitaires », c’est-à-dire sans rapport réel avec le temps de travail des enseignant.e.s. Le MESRI vise ainsi à accentuer la concurrence entre établissements diversement dotés et à renforcer les logiques de marché au détriment de celles de service public.
Telle que le pense le SNESUP-FSU, la réussite étudiante en licence, et plus généralement à l’université, est de permettre aux étudiants et aux étudiantes de devenir des citoyen.ne.s formé.e.s et émancipé.e.s, et des professionnel.le.s autonomes. Ce n’est certainement pas l’objectif visé par l’application de ces textes qui organisent une employabilité à court terme basée sur la certification de compétences et qui tendent à faire de l’étudiant.e le ou la responsable de sa propre réussite ou de son échec par l’individualisation extrême, inégalement gérable au sein des publics étudiants, des parcours de formation. Ces textes organisent le passage d’une logique de moyens à celle d’une obligation de résultats : cela induirait un changement radical de notre métier en nous transformant en certificateurs. Notre rôle de formateur à l’université est de penser et d’organiser une progression pédagogique en vue de l’acquisition d’une qualification sanctionnée par le diplôme national de licence. La licence doit avoir une cohérence pédagogique et ne doit pas être une accumulation de crédits ECTS disparates et de juxtaposition de « blocs de compétences ». Le SNESUP-FSU rappelle son exigence de cadrage national des diplômes.
La prise en compte des spécificités de l’étudiant.e est un pilier central de sa réussite. Il faut cependant que les dispositifs d’aide bénéficient de moyens humains pérennes à la hauteur des besoins nécessaires. L’individualisation du parcours étudiant conduit au contraire à des parcours d’initié.e.s et à l’exclusion des autres. Les contenus des parcours doivent être fortement cadrés selon une procédure nationale, en distinguant, au coeur des parcours mono ou pluridisciplinaires, les contenus disciplinaires des autres, pour permettre l’accès de droit en master.
En conséquence, le SNESUP-FSU réuni en congrès d’étude demande :
- le retrait du projet actuel ;
- le report du calendrier de l’arrêté licence et du cadre national des formations pour permettre à l’ensemble de la communauté de l’ESR de concevoir de tout autre arrêté ;
- un plan pluriannuel de recrutement de fonctionnaires et la programmation de constructions, rénovations et équipements ;
- le rejet de la logique des blocs de compétences ;
- un véritable cadre national des contenus, des modalités et de la répartition des volumes horaires de formation.