La semaine dernière, le parti du président de la République a subi un revers politique. À la crise sanitaire qui perdure, à une crise économique et sociale que le confinement a accélérée et à la crise environnementale, le gouvernement répond par une “stratégie du choc” particulièrement dangereuse. Il persiste dans les réformes néo-libérales initiées depuis le début du quinquennat malgré une forte contestation sociale. Les plans de licenciements massifs et les cadeaux aux actionnaires se succèdent, le chômage explose parallèlement aux dividendes versés, les perspectives d’emplois pour la jeunesse s’éloignent. C’est donc bien d’une toute autre politique dont le pays a besoin.
Ce qui se joue aujourd’hui dans l’ESR est une parfaite illustration de cette politique. L’avis très critique rendu la semaine dernière par le Conseil Économique Social et Environnemental (CESE) sur le projet de LPPR qui nous est imposé avec brutalité et mépris, a montré à quel point il est porteur de menaces pour l’avenir.
Un regard sur la période écoulée depuis le début du quinquennat révèle l’ampleur des attaques que nous avons subies. Le bilan de la politique menée par Vidal est sans appel : Loi relative à l’orientation et à la réussite des étudiants (Loi ORE) et Parcoursup en mars 2018, augmentation des droits d'inscription pour les étudiant·es extra-communautaires en décembre 2018, ordonnance de décembre 2019 permettant les regroupements expérimentaux des établissements et dérogatoires au code de l’éducation, LPPR, loi de précarisation et de privatisation de la recherche, venant couronner le tout. Restriction de l’accès à l’enseignement supérieur, réformes structurelles, attaque des statuts et précarisation, asphyxie budgétaire et désengagement de l’État... et plus largement la loi Pacte, la loi de transformation de la fonction publique, le retour de la réforme des retraites et l’échec annoncé du Ségur de la santé. Tout est là.
Parallèlement, la démocratie universitaire, mise à mal depuis les lois structurelles de 2007 (Loi LRU) et 2013 (Loi dite Fioraso), puis par l’ordonnance de décembre 2019 concernant les regroupements, continue d’être bafouée. Des réactions s’organisent : des élu·es de conseils centraux démissionnent pour dénoncer des choix politiques dangereux, des défauts de transparence ou des contournements des instances. Ailleurs des vice-président·es démissionnent pour refuser une fusion ou s’opposer à l’opacité de tel projet d’excellence. Plus que jamais le SNESUP-FSU réaffirme son exigence de modification de la loi électorale et de la composition des Conseils d’administration et dénonce le poids des membres extérieurs, notamment lors de l’élection du ou de la président·e qui transforme les Conseils d’administration, les Conseils d’institut et les Conseils d’école en chambres d'enregistrement.
Pendant ce temps, les universités continuent à préparer dans une très large improvisation une rentrée qui s’annonce comme la plus périlleuse que l’université française ait jamais connue. Au cœur d’une tempête sanitaire économique, sociale et environnementale, épuisante physiquement et nerveusement, les enseignant·es et enseignant·es- chercheur·es se trouvent soumis·es à une pression de travail extrême : charges et tâches administratives et pédagogiques redoublées, redéfinition des enseignements et des examens, multiplication des scénarios de rentrée, etc.
Faute de moyens, qu’ils soient financiers ou humains, pour permettre notamment des mises aux normes sanitaires d’urgence et les locations de locaux et pour accueillir plus de petits groupes, les établissements de l’ESR sont en train de prendre des décisions dont il faut aujourd’hui bien mesurer les conséquences. L’instrumentalisation politique de la crise sanitaire pour imposer partout la numérisation et l’hybridation des enseignements (voir l’appel à projets particulièrement dangereux de l’ANR sur l’hybridation des formations auquel il faut répondre avant le 6 juillet !) et accomplir le projet d’un basculement de l’ESR dans le virtuel au profit des GAFAM et du secteur privé doit cesser. Le SNESUP-FSU appelle à refuser l’hybridation imposée qui aurait pour conséquence une aggravation des conditions d’enseignement et un accroissement des inégalités.
La ministre de l’ESR a balayé d’un revers de la main notre demande, faite il y a plus d’un mois avec l’ensemble des syndicats concernés de la FSU, d’un plan d’urgence à la fois pour la rentrée et pour rattraper le retard accumulé depuis des années. Le mépris de la ministre pour les instances consultatives et le dialogue social s’est également illustré par les conditions ubuesques de la tenue du dernier CNESER sur la LPPR et plus récemment par le refus de demander un avis au CTU auquel le projet a été présenté uniquement pour information alors que les conséquences sur les statuts des enseignant·es- chercheur·es seront lourdes.
Face à ces impérities, les organisations syndicales sont à l’offensive et restent force de proposition. La FSU vient de rendre public un plan pour la jeunesse. Le SNESUP-FSU continue à porter le projet d’une autre loi de programmation pour l’ESR, plus ambitieuse sur le plan budgétaire, fondée sur le recrutement de personnels titulaires et sur le financement récurrent des établissements et des organismes de recherche à hauteur de leurs besoins réels. Nous ne laisserons pas le ministère faire de la rentrée universitaire une pagaille programmée. Ces choix politiques visent à dégrader les services publics pour les délégitimer aux yeux des usagers et amorcer ensuite leur privatisation. Notre métier est remis en question, chacun·e doit se saisir des moyens pour le défendre.
Dès à présent, le SNESUP-FSU appelle à préparer les luttes qui se profilent dès la rentrée pour mettre en échec les régressions sociales que le gouvernement, suivi par des Présidences d’Université, entend nous imposer.
Voté à l’unanimité