LA FORMATION ET LE RECRUTEMENT DES ENSEIGNANT·ES NE PEUVENT S’IMPROVISER ! - CP du 27 novembre 2019

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Publié le : 27/11/2019

 

Le 20 novembre dernier, le MEN a (enfin ?) fait quelques annonces concernant les concours de recrutement d’enseignant·es et les contours du stage en seconde année de master MEEF. Elles sont largement en dessous des attentes de précisions des acteurs et actrices de la formation et loin de répondre à leurs interrogations.

Formellement, quatre épreuves sont retenues pour l’ensemble des concours (hors agrégations qui resteraient sur la logique actuelle) constituées de deux écrits pour l’admissibilité et deux oraux pour l’admission. Étant donnée l’absence de précisions à ce stade, de nombreux éléments interrogent légitimement : quel programme pour l’épreuve 1 (« écrit académique ») ? Qu’entend le MEN par « approche polyvalente d’un sujet » pour le CRPE ? Quels seront les champs de « recherche » susceptibles d’être proposés par les documents fournis (épreuve 2 de l’écrit) pour le CRPE ? De tels documents sont-ils susceptibles d’être fournis pour le second degré ? À quoi renvoie l’expression « thèmes d’enseignement » mentionnée pour le premier oral du CRPE ? Quel rapport entre ces thèmes et les disciplines d’enseignement inscrites au programme de l’école primaire ? Va-t-on recruter, dans le second degré, des professeur·es d’EPS, sans aucune évaluation portant sur la pratique des activités physiques et sportives ? Et, dans le premier degré des professeur·es des écoles sans aucune épreuve portant sur l’éducation physique ? Et comment évalue-t-on qu'un·e candidat·e que l'on ne voit pas agir en situation réelle « incarne » ou pas une des « valeurs » attendues ? Quelles déclinaisons spécifiques des épreuves pour les CAPLP ? Etc.

Au-delà de ces interrogations qui portent sur le contenu des épreuves, dont la liste ici n’est pas exhaustive, une autre question majeure subsiste : celle de la composition des jurys des différentes épreuves en particulier pour l'épreuve orale n° 2 au cours de laquelle le ou la candidat·e devrait montrer sa connaissance des contextes éducatifs, mais aussi « évoquer son parcours et son travail de recherche » ce qui supposerait une triple expertise de la part des examinateur/trices.

Sur toutes ces questions, trop d’incertitudes et d’impensés subsistent pour envisager qu’une telle « réforme » puisse être mise en œuvre à la rentrée. Il relève aussi de la responsabilité des ministères et de celle de l’État employeur des étudiant·es en M2 sous contrat public d’apporter très rapidement les éclaircissements indispensables : le stage en tant que contractuel·le est-il considéré comme obligatoire ou sera-t-il un choix de la part de l’étudiant·e ? Les étudiant·es qui ne feraient pas, ou ne pourraient pas faire ce choix, peuvent-ils/elles suivre un MEEF ? En tout état de cause, nous rappelons que nous ne pouvons accepter que les capacités d’accueil soient fixées à partir du nombre de berceaux de stages de M2.

Il est en revanche de la responsabilité des universités comme acteurs/actrices de la formation de penser la formation universitaire et professionnelle des futur·es enseignant·es et de créer les conditions d’une élaboration collective des maquettes, dans l’intérêt des étudiant·es et futur·es enseignant·es. Concevoir des maquettes de formation ne se limite pas à lister des contenus à enseigner, c’est prévoir le cadre et les conditions d’études des différentes catégories d’étudiant·es, la cohérence de leurs parcours et les articulations nécessaires à l’appropriation de cette formation. Un tel travail ne saurait être mené dans la précipitation que nous connaissons aujourd’hui alors que la « réforme » a commencé à être évoquée il y a dix-huit mois, et en en excluant les acteurs/trices. La concertation au sein des équipes pluricatégorielles cohérentes nécessite aussi du temps.

On observe une nouvelle fois un refus de respecter le fonctionnement universitaire dans lequel le long travail d’élaboration collectif doit être suivi du chemin de validation par les différentes instances élues de l’université.

Le ministère vise, par ses annonces, à diviser les équipes, en les amenant à se battre pour des miettes d’UE et/ou la « défense » de supposés pré-carrés (« université » contre « terrain », « composantes » contre « INSPE »...), de façon à imposer une conception très réductrice de la formation « professionnalisante » qui survalorise la présence constante sur le terrain et lui permet d’utiliser les étudiant·es comme moyens d’enseignement : c'est la conception du ministre actuel de l’Éducation nationale.

Dans ce contexte, le SNESUP-FSU appelle les personnels engagés dans la formation des enseignant·es, notamment dans les INSPE, au combat collectif. Il demande le report de cette réforme ainsi que l'ouverture de véritables négociations, pour que puissent exister les conditions d'une formation qui articule étroitement les apports des savoirs, leur mise en œuvre dans la pratique et leur analyse.