Motion contre la LPPR votée par le conseil d'administration
le 26 juin 2020
En tant que membres du personnel administratif, enseignants, enseignants-chercheurs, précaires ou titulaires, des IEP, nous sommes inquiets de la LPPR telle qu'elle est préfigurée dans les travaux préparatoires qui ont été rendus publics. Le modèle qui se dessine remet en cause le service public de l'ESR, et notamment les libertés académiques et la collégialité, et aggrave la précarisation croissante des conditions de travail dans l’ESR. La priorité donnée à l'ANR accentue un peu plus encore la logique de recherche sur projets, qui nuit, comme chacun sait, à la qualité de la recherche produite et favorise la construction d'usines à gaz aux noms baroques. Le statut de maître de conférences, essentiel au bon fonctionnement de l'université, est à terme menacé par la mise en place des tenure tracks et autres recrutements précaires. La comparaison avec l'étranger montre combien les soi disant "modèles" qui s'y trouvent y font au contraire des ravages dont souffrent nos collègues allemands, suisses ou américains. En un mot, ce projet est une menace de mise sous tutelle et d'appauvrissement de l'université, les crédits annoncés étant insuffisants et concentrés sur l'ANR. En revanche, le Crédit Impôt Recherche, qui ne sert à rien, sinon à servir de subvention déguisée aux entreprises, est maintenu.
Tout indique que cette loi menace en particulier les "petits" établissements comme les IEP, puisque les activités de recherche vont progressivement être concentrées dans quelques grands établissements, si bien que nos formations vont se retrouver déconnectées de la recherche.
Alors que la mobilisation pour le retrait de ce projet avait rassemblé, depuis janvier et juste avant le confinement, l'immense majorité des acteurs de l’enseignement supérieur et de la recherche – dont plus de 108 établissements universitaires, 268 laboratoires; 134 revues ; 16 sociétés savantes ; 35 sections du CNU, le gouvernement a décidé de rester sourd à ces demandes de concertation et d’imposer son projet à marche forcée. Il démontre ainsi sa méconnaissance de la recherche et son hostilité foncière à son encontre.
Désireux de défendre l'université et la recherche publiques, nous redisons notre refus de ce projet, et de la précarisation, la concurrence, la dissociation entre missions de recherche et d’enseignement auxquelles la LPPR entend contribuer.
Nous appelons à la mobilisation inter-IEP et invitons les différentes instances de nos établissements à prendre position publiquement contre les orientations de la LPPR. Une
déclaration des directeurs des IEP serait la bienvenue.
Il nous semble essentiel d'exiger :
- l’ouverture de réelles discussions pour construire une loi de programmation garantissant le principe de liberté et de pluralité des activités scientifiques et académiques.
- la concertation avec nos instances représentatives et nos associations professionnelles
- la réaffectation des six milliards annuels du Crédit Impôt Recherche à la recherche publique ;
- l’augmentation significative des dotations annuelles des unités de recherche par des financements pérennes
- le refus de toute précarisation du statut des enseignant.e.s-chercheur.e.s, la création de postes supplémentaires d’enseignant.es et/ou chercheur.es et de BIATSS.
- la revalorisation de leurs métiers et carrières (en commençant par le dégel du point d’indice et en facilitant les congés pour recherche)