Paris, le 7 juillet 2017
« CONTRAT DE RÉUSSITE ÉTUDIANT » OU SÉLECTION CACHÉE ?
Par un courrier daté du 29 juin 2017, la Ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation souhaite mettre en place le « contrat de réussite étudiant ». Dans la perspective d'identification de pré-requis à l'entrée en licence, elle encourage les Présidents d'université à afficher pour chaque mention de licence notamment "les matières ou compétences pour lesquelles un niveau d'exigence est attendu" sans aucune consultation préalable de la communauté universitaire et des usagers, ni des organisations syndicales qui les représentent.
Ce contrat de réussite reposerait sur 4 points, clairement exposés dans ce courrier :
- Les souhaits exprimés par les futur.e.s étudiant.e.s.
- Les exigences propres à chaque cursus diplômant.
- La capacité d'accueil des formations.
- « Prendre en compte sans s'y réduire, les attentes et les besoins exprimés par la société et l'économie françaises. »
Le courrier de la Ministre pose la continuité secondaire-supérieur, non en terme de droit des citoyens à l’enseignement, à la culture et à la recherche, mais en terme d’ajustement entre des souhaits, des pré-requis, des capacités d’accueil - qui permettent à l’État de déroger à ses obligations -, et des besoins sociétaux et économiques.
Ce pseudo « contrat de réussite » proposé par la ministre et les prérequis, qui s’inscrivent dans une logique de compétition entre individus et de productivité des études, n’est pas la solution pour faire face à l’augmentation continue du nombre d’étudiant.e.s. Dans un monde de plus en plus complexe, il est essentiel qu’un nombre croissant de citoyen.ne.s aient accès aux études supérieures et à une qualification nationalement reconnue et du niveau le plus élevé. Alors que l’enseignement supérieur et la recherche devraient être une priorité nationale en termes d’investissement, c’est aujourd’hui une variable d’ajustement dans le budget. Les rustines que l’on nous propose pour cacher ce délitement programmé du service public sont indignes.
Pour le SNESUP-FSU, le bac donne l’accès de droit en licence car c’est le premier grade de l’enseignement supérieur et la licence doit rester un diplôme national accessible sans sélection.
Les souhaits de poursuite d’études exprimés par les futur.e.s étudiant.e.s doivent s'accompagner d'une orientation librement choisie, construite sur le long terme, à la fois pré-bac et post-bac, avec des possibilités de passerelles entre les formations de l’université et/ou celles relevant d’autres établissements. Cette orientation, prenant en compte les souhaits étudiant.e.s en terme de poursuite d'études, s’oppose à la logique technico-administrative d’affectation des étudiant.e.s dans le supérieur à l’œuvre avec APB, outil discriminatoire, notamment pour les lycéen.ne.s issu.e.s des milieux défavorisés. Le SNESUP-FSU est opposé à l’adéquation mécanique de type APB entre les séries du bac et la formation sollicitée.
Si l’échec des étudiant.e.s à l’université est particulièrement visible en première année, "20% seulement des étudiant.e.s qui entrent dans le supérieur (toutes filières confondues) en sortent sans diplôme, ce qui est l'un des taux les plus bas de l'OCDE[1] (31% en moyenne)" !
Pour le SNESUP-FSU l’ESR n'a pas pour mission principale de répondre au marché de l'emploi et aux besoins économiques à court terme au travers des capacités d’accueil. L’insertion professionnelle est légitime : la formation doit préparer l’étudiant.e. à être un.e professionnel.le autonome et un.e citoyen.ne émancipé.e.
Le SNESP-FSU rappelle qu’avec 7% de candidat.e.s supplémentaires au bac cette année par rapport à 2016, c’est 50 000 étudiant.e.s qui rejoindront l’enseignement supérieur à la rentrée 2017. Cette augmentation[2] est une chance, mais des investissements sont nécessaires pour les accueillir dans des conditions optimales. Or le nombre d'enseignant.e.s- chercheur.e.s titulaires pour les encadrer a baissé ces dernières années et le budget par étudiant.e est passé de 11 040€ en 2011 à 10 300€ en 2016.
Le SNESUP-FSU œuvrera avec les autres organisations syndicales et la communauté universitaire pour construire des solutions alternatives afin d’accueillir et de faire réussir les nouvelles générations.
Bienvenue aux nouveaux bacheliers !
[2] Projections CEREQ : 2,81 millions d'étudiant.e.s devraient être inscrit.e.s dans l'enseignement supérieur en 2024, soit une augmentation de 335 000 par rapport à 2014) et particulièrement dans les filières STAPS (+ 106 000 étudiant.e.s selon les mêmes projections)