Communiqué des sections SNESUP-FSU de l'Université de Montpellier
Changements de statuts pour l’Université de Montpellier :
une "expérimentation" dangereuse et inutile
24 mars 2021
Le 25 janvier 2021, les élus au Conseil d’Administration de l’Université de Montpellier ont appris que leur établissement, l’Université de Montpellier, allait changer de statuts dans les prochains mois pour devenir un Etablissement Public à caractère Expérimental (EPEx).
La présidence de l’Université répondrait ainsi aux nécessités de l’Isite MUSE au regard des possibilités offertes par l'Ordonnance n° 2018 1131 du 12 décembre 2018 https://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/JORFTEXT000037800979/
Le calendrier est très contraint puisqu’il s’agirait d’une création de l’établissement public expérimental « Université de Montpellier » en septembre 2021 après un passage en juin au CNESER et un passage obligé par les instances de l’université.
La présidence s’est d’ores-et-déjà débarrassée d’une pseudo-concertation avec les syndicats lors d’une réunion « zoom » le 9 février 2021 : « Ne vous inquiétez pas, cela ne va rien changer pour vous ! » Au mensonge s’ajoute la procès d’intention.
L’équipe de direction joue bien entendu la partition du changement indolore et sans conséquences, nous invitant à lui faire confiance ! N’a-t-elle pas réussi la fusion des universités (en laissant l’une des trois de côté mais peu importe), réussi le concours Isite (un sous Idex après plusieurs échecs précédents) et réduit fédéré toute la recherche du site ? Les conseils centraux ne sont-ils pas complètement dociles et les syndicats muselés depuis des années ? La communauté scientifique n’est-elle pas complètement anesthésiée et soumise aux injonctions du système par appels à projets ? La loi de Programmation de la Recherche (LPR), instituant toujours plus de précarité, n’est-elle pas passée malgré les protestations de quelques grincheux ? La société n’a-t-elle pas tout simplement autre chose à faire en ce moment, soumise à la crise sanitaire, à son cortège de pauvreté et précarité, y compris parmi les personnels et étudiants de l’Université ?
En effet, se battre contre de tels projets, de destruction de l’Université comme Service Public, peut paraître bien dérisoire. Malgré ce contexte, ministère et présidence, ne renoncent pas à ce projet néfaste ! Nous appelons donc à la résistance !
Le basculement vers un « EPEx » possède deux facettes également dangereuses. D’une part, il permettra de déroger au Code de l’Éducation concernant toute la vie interne de l’institution, et d’autre part il crée de nouvelles structures intermédiaires nocives qui déshabillent toujours plus nos composantes et nos conseils collégiaux.
Arrêtons-nous pour commencer sur les Collegiums, chargés du pilotage des formations au-dessus des UFRs, Ecoles et Instituts, pour dompter les visions divergentes créer de nouvelles transversalités. Quel est le sens de créer un Collegium « Law & Politics », sinon de déposséder l’UFR Droit et Science Politique du contrôle sur ses formations ? Idem pour les Collegium « Education », ou « Technical Studies », chacun centrés sur une ou deux composantes seulement. Alors que les Départements Scientifiques (DS) ont été vécus comme confiscatoires de la facette Recherche des UFRs et écoles, c’est désormais la facette Formation qui se retrouve soustraite aux décisions collégiales de leurs conseils.
Autre instrument créé dans cette réforme : le COMISS (Comité des investissements stratégiques et structurants) réunira les dirigeants des 16 partenaires du projet (CNRS, IRD, INRIA, …). La structuration des investissements de recherche était jusqu’à ce jour le fruit des réflexions et débats de la Commission Recherche du Conseil Académique (CAc-CR), qui se retrouvera en grande partie vidé de sa substance, alors qu’il donnait un éclairage pluriel sur les projets soumis par l’ensemble de notre communauté !
Nous pourrions aussi discuter de la Graduate Division, pour chapeauter les Ecoles Doctorales et les "formations d'Excellence" ; de l’International Advisory Board, qui prendra la suite de celui de l’iSite MUSE qui en 3 ans n’a produit aucun avis écrit sur aucun sujet.
Enfin, l’article 6 de l’ordonnance de la LPR précise que « l'établissement peut exercer des prestations de service, prendre des participations, créer des services d'activités industrielles et commerciales, participer à des groupements et créer des filiales ». En résumé, l’université peut devenir une entreprise et doit ainsi se doter de statuts qui lui permettent cela. L'EPEx sera le moyen de fondre l'ensemble des personnels dans ce moule, et de réduire à petit feu, insidieusement, les Libertés Académiques1.
En conclusion, l’EPEx, c’est une volonté délibérée de créer des strates aux ordres au sein de l’établissement, partout où les décisions pouvaient encore émaner de nos communautés, et de porter atteinte à la représentativité des personnels dans les structures de décision, à la collégialité.
Comment s’assurer que toutes les missions de service public, en particulier l’Enseignement et les services aux étudiants soient bien pris en compte par un EPEx qui sera tout tourné vers l’Excellence de sa Recherche ? Quelle est la place de l'étudiant dans ce projet ?
Sur les autres sites universitaires en France, partout où un EPEx s’est installé2, le Snesup-FSU constate des catastrophes, qui sont la conséquence directe des injonctions du jury "Idex&Isite" à renforcer les pouvoirs de direction présidentielle au détriment des composantes3. Nous constatons une perte de collégialité et de démocratie, une perte quasi-définitive des rôles décisionnaires des conseils centraux et des conseils d’UFR réduits à des avis consultatifs au profit de conseils et commissions ad hoc constitués d'heureux nommés (puisqu’on ne peut parler d’heureux élus dans ces commissions), et une emprise accrue de la bureaucratie et de l'administration, génératrice de nouvelles surcharges pour tous les personnels.
Le Snesup-FSU appelle les personnels de l’Université à exiger une consultation sur ce sujet. L’équipe de Philippe Augé n’a pas été élue pour mettre en place cette destruction de notre université. Nous pouvons encore l’empêcher par un message clair envoyé à la présidence : demandez vous aussi une consultation des personnels de l’établissement !
Les sections Snesup-FSU de l'UM.
3 Rapport public de l'ANR sur les Idex Saclay et PSL, 11/2020 : "Parmi les recommandations communes, celles concernant la gouvernance soulignent que la capacité de la présidence de l’université à assurer la gestion quotidienne et à prendre les décisions stratégiques ou difficiles doit être progressivement renforcée, s’agissant en particulier de l’approbation du recrutement des professeurs, de la supervision de l’ensemble du budget et de la reconnaissance du président comme interlocuteur privilégié des tutelles. L’instance décisionnaire gagnerait également à réduire sa taille et à être dirigée par une personnalité extérieure. D’autres recommandations visent à pérenniser les acquis et à inscrire la dynamique actuelle dans le long terme: faire des processus d’assurance qualité et d’évaluation internes des mécanismes consensuels d’évolution; ôter dès que possible des dispositions statutaires les éléments permettant le déploiement de stratégies autonomes de la part de composantes [...]."
Les militants Snesup-UM sont présents dans une majorité des composantes de l'UM (Faculté d’Économie, Faculté de Pharmacie, Faculté des Sciences, Faculté d’Éducation, IUTs de Montpellier-Sète, Nîmes et Béziers, MOMA, Polytech). Ils sont à votre écoute pour discuter, débattre, aider. N'hésitez pas à nous contacter par mail ici.